Contrats de fourniture d’eau : gare aux clauses abusives

Face à la persistance de nombreuses clauses illicites ou abusives dans les règlements de service d'eau, ainsi que des irrégularités dans la présentation des factures aux abonnés, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a décidé de renforcer son action d'accompagnement pédagogique à destination des collectivités en publiant un guide pratique. 

La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) vient de mettre en ligne un guide pédagogique relatif aux règlements de service d’eau qui font office de contrats de fourniture liant distributeurs et abonnés. Issu d’un retour d’expérience, ce document répertorie la réglementation applicable aux services d’eau et les clauses illicites ou abusives relevées à l’occasion de cinq années d’enquêtes. Ce guide, destiné aux services de contrôle de la DGCCRF, constitue un outil d’accompagnement à l’adresse des collectivités utile “dans leur démarche de mise à jour de leurs règlements de service d’eau”. Il les invite en particulier à s’assurer que ces règlements ne contiennent plus de clauses abusives ou qui pourraient être considérées comme déséquilibrant de manière significative la relation avec le consommateur au regard de la jurisprudence.

Lors de la dernière vague d’enquêtes du plan quinquennal de vérification des factures et règlements des services d’eau (2008-2014), 200 clauses illicites, 100 clauses abusives et 400 clauses présumées abusives (sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire) ont été recensées. Les principaux manquements identifiés font l’objet de rappels à la réglementation selon cinq clés d’analyse : le droit au raccordement et les informations précontractuelles – notamment droit à rétractation -, le contrat d’abonnement, le prix de l’eau, le paiement de la facture, et les droits et obligations du service de l’eau et de l’usager.

 

Abonnement au service

Parmi les clauses interdites ou considérées comme abusives, certaines sont déjà bien connues et consistent par exemple à se référer à des conditions générales “non remises à l’abonné” ou à lui faire souscrire d’avance à toute modification ultérieure du règlement de service concernant en particulier la durée du contrat, le prix du service ou ses caractéristiques. Autre élément à purger des contrats, les demandes de caution ou de dépôt de garantie aux consommateurs. Egalement dans le viseur de la DGCCRF, la souscription à un abonnement réservé aux seuls propriétaires ou la clause subordonnant la conclusion du contrat à l’engagement par le propriétaire du logement de garantir le paiement des sommes ultérieurement dues, sans prévoir d’alternative à cet engagement. Le guide piste de même les clauses interdisant aux consommateurs de résilier à tout moment leur contrat de fourniture, déterminant une durée minimale du contrat, ou encore autorisant la fermeture d’un branchement sans mise en demeure ni explication préalable.

 

Tarifs pratiqués

Autre axe d’analyse, le prix de l’eau. La Commission des clauses abusives recommande là encore de longue date que le prix du mètre cube à la date de la conclusion du contrat et les modalités de révision de ce tarif soient inclus dans le règlement de service. De son côté, la DGCCRF a engagé une démarche d’harmonisation du mode de calcul de ce prix au litre. Un arrêté portant modification de l’arrêté du 10 Juillet 1996 relatif aux factures de distribution de l’eau et de collecte et de traitement des eaux usées devrait donc paraître dans le courant de l’année après concertation avec les fédérations de professionnels et de collectivités (Fédération professionnelle des entreprises de l’eau-FP2E, Fédération nationale des collectivités concédantes et régies-FNCCR, Association des maires de France-AMF). Quelques exemples de clauses interdites ou considérées comme abusives sont à relever : frais de vérification des compteurs, d’ouverture et de fermeture des branchements fixés en référence à des volumes d’eau ; consommation minimale intégrée dans la partie fixe de l’abonnement ; tarification rétroactive ; tarif différent entre les résidents permanents et les autres abonnés ; obligation de payer la totalité de l’abonnement relatif à la période en cours.

 

Lisibilité de la facturation

Un point complet est en outre proposé sur la présentation de la facture. Pas moins de 150 irrégularités avaient été relevées lors de la dernière enquête : tarification forfaitaire (normalement réservée aux communes de moins de 1.000 habitants et si la ressource en eau est naturellement abondante) ; répercussion automatique de nouveaux frais sur la facture ; paiement intégral annuel d’avance, etc. D’autres exemples concernent les pénalités encourues par l’abonné en cas de retard de paiement ou de non-paiement (indemnités, facturation d’intérêts de retard). Autres clauses abusives repérées : celles qui excluent pour le consommateur toute possibilité de contester la facturation et entravent l’exercice des voies de recours en cas de litige. Le guide fait également apparaître des manquements relatifs au fonctionnement du compteur : paiement des frais de vérification des compteurs ; transfert à l’abonné de la garde et de la surveillance du branchement situé sur le domaine public ; impossibilité pour l’abonné de contester la quantité d’eau consommée, de réclamer des sommes indûment payées, d’être dédommagé en cas de compteur défectueux ou encore de pouvoir apporter la preuve de sa consommation en cas d’arrêt du compteur. Les collectivités ont par ailleurs du mal à se défaire de leur tendance à imputer la charge des dommages de toute nature (fuites, gel du compteur, incidents en aval du branchement, incidents de vérification technique) à l’abonné, et ce même en dehors des cas de force majeure.

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