William Koeberlé : « Il faut cesser d’opposer centre-ville et périphérie »

Le Conseil du commerce de France (CdCF), qui regroupe une trentaine de fédérations professionnelles représentant près de 900 000 entreprises, observe les mutations du commerce et préconise les moyens qui lui permettraient de revenir dans le centre des villes. Son président William Koeberlé les précise ci-dessous.

Après des années d’étalement urbain et de développement commercial en périphérie, les élus, notamment dans les villes petites et moyennes, veulent revitaliser leur centre-ville et y faire revenir des activités marchandes. Est-ce encore possible ?
William Koeberlé : Oui, à la condition de cesser d’opposer centre-ville et périphérie ! Pour qu’un commerce fonctionne, il faut des clients prêts à acheter. L’enjeu est de favoriser la modernisation du commerce physique pour répondre aux nouvelles attentes des clients et maintenir des emplois dans les territoires. Nombre de causes explique la désertification des centres-villes : loyers trop élevés, fiscalité croissante, problèmes d’accessibilité et de stationnement, vacance de logements, faible préservation du patrimoine et du bâti, fuite des services publics et des professionnels de santé. Les réponses doivent être adaptées en fonction du contexte local.

Vous préconisez notamment de créer des périmètres, dans des zones fragilisées, où les commerçants bénéficieraient d’allègements d’obligations légales et réglementaires. Pouvez-vous détailler ces mesures ?
WK : Le CdCF avait proposé la création de périmètres de modernisation et de restructuration urbaines pour les bassins de vie ou d’emploi dévitalisés. Ils devaient conduire à un allègement des normes d’urbanisme et des prélèvements fiscaux et sociaux (exonérations ou abattements de taxe foncière, de contribution économique territoriale, de taxe sur les surfaces commerciales, de droits de mutations, de taxe locale sur la publicité extérieure), afin d’accroître la capacité d’investissement des commerçants et faciliter l’opération de revitalisation. Mesures purement expérimentales sur certains territoires au début, elles n’ont finalement pas été limitées aux villes moyennes.

Outre les dispositions que peuvent prendre les pouvoirs publics, qu’attendez-vous des municipalités ?
WK : Il est primordial de rompre avec les habitudes du passé. Place à la concertation, en amont et de façon constructive. Les commerçants sont les mieux à même de connaître les habitudes de consommation de leurs clients. Ainsi, il faut prendre en compte les besoins de stationnement et de circulation, mais aussi de logement et d’infrastructures. Il faut penser la cité dans sa globalité.

Comment voyez-vous le commerce à dix ou vingt ans ? Le e-commerce aura-t-il supplanté les points de vente physique ?
WK : Le e-commerce sera le bras armé des commerces traditionnels pour peu que ces derniers aient trouvé les moyens d’intégrer le numérique dans leur relation avec leur prospect. C’est l’omnicanalité  au service du client : être visible et proposer ses produits en ligne (sur le web, mais aussi en magasin en 3D, voire en hologramme, etc.), faciliter le paiement (caisse connectée, sans contact, reconnaissance faciale ou digitale) et la livraison choisie (à domicile, en point relais, clic&collect…). Enfin, former les salariés des commerces à cette ère digitale et maintenir le conseil humain.

Comment les commerçants peuvent-ils accompagner cette mutation des modes de consommation et des habitudes d’achat ?
WK :
Ce que nous appelons nouveaux fondamentaux du commerce, c’est répondre aux nouvelles attentes de consommateurs, hyper connectés, hyper exigeants, tout en sachant relever les défis de la numérisation des modes de consommation.

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