Une QPC sur la gestion des réseaux d’électricité des communes

Le comité de liaison des énergies renouvelables (Cler) a décidé de soutenir une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à l'article L. 111-52 du Code de l'énergie qui définit les gestionnaires des réseaux de distribution autorisés.

Les communes – ou leurs groupements – sont historiquement propriétaires des réseaux de distribution d’énergie. Elles sont toutefois contraintes d’en confier la concession à EDF pour la fourniture d’électricité aux tarifs réglementés et à ERDF (filiale à 100% d’EDF) pour la partie distribution. Seules y échappent les 7% des communes qui, en 1946, lors de la nationalisation de l’électricité et du gaz, avaient conservé leur gestion en régie et possèdent en conséquence une entreprise locale de distribution (ELD).

Cette situation ” de monopole quasi absolu d’EDF ” sur la distribution et la fourniture d’électricité, empêche les collectivités locales ” d’exercer un véritable contrôle démocratique des réseaux “, considère le comité de liaison des énergies renouvelables (Cler). Cette situation n’est en outre ” plus adaptée aux enjeux énergétiques actuels, face auxquels la maîtrise effective de l’ensemble des réseaux locaux par les collectivités constituerait un véritable atout “, considère-t-il. Pour ces raisons, l’association a décidé de soutenir une QPC dans le cadre du contentieux relatif au renouvellement de la concession entre la ville de Paris et EDF/ERDF pour la distribution et la fourniture aux tarifs réglementés de l’électricité.

 

Rupture d’égalité

Pour étayer son analyse, le Cler vient de communiquer une étude relative à la constitutionnalité de l’article L. 111-52 du Code de l’énergie réalisée par Dominique Rousseau, Professeur à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne. Ce dernier estime que cet article qui définit les gestionnaires des réseaux autorisés (ERDF et les ELD) porte une atteinte caractérisée à trois principes constitutionnels : la libre administration locale, la liberté contractuelle et le principe d’égalité.

En premier lieu, si l’intérêt général pouvait justifier un monopole de la distribution de l’électricité en 1946, ce même intérêt général ne justifie plus actuellement l’atteinte portée à la libre administration locale, plaide-t-il. Le principe de péréquation qui permet, pour des raisons de solidarité nationale, de fournir un service à prix unique sur le territoire français apparaît en particulier indépendant de la situation de monopole. L’argument tenant à la cohérence du réseau semble de même très discutable.

L’analyse juridique des conditions de passation des contrats de concession pour les réseaux de distribution d’électricité à EDF/ERDF montre par ailleurs leur méconnaissance du principe de liberté contractuelle. Dans le cas présent, les collectivités doivent non seulement faire choisir un partenaire déterminé, mais elles sont également obligées de contracter.

Il apparaît enfin, selon Dominique Rousseau, que l’article L. 111-52 organise une rupture d’égalité qui n’est justifiée ni par une différence de situation, ni par l’intérêt général. Le seul critère interdisant en effet aux collectivités d’exercer leur compétence en matière de distribution d’électricité par le biais d’une ELD étant la date de création d’une telle régie avant 1946.

Après son rejet par le tribunal administratif de Paris, il appartient désormais à la cour administrative d’appel de décider de transmettre ou non cette QPC au Conseil d’Etat dans les prochains jours.

 

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