Loi Littoral : trente ans, et après ?

La loi Littoral du 3 janvier 1986 s'est révélée un précieux atout pour lutter contre le bétonnage des côtes et gérer la forte pression s'exerçant sur le littoral. Trente ans après, son co-rédacteur Lucien Chabason est revenu sur sa genèse et son actualité, devant un parterre de spécialistes réuni le 16 février à l'Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri).

Rares sont les lois faisant autant consensus que la loi Littoral. Du moins auprès des habitants car les élus sont souvent plus remontés contre son application, jugée à géométrie variable. Synonyme dans les esprits d’une côte protégée, respectée, cette loi consacrant juridiquement un terme jusque-là essentiellement géographique – le littoral – fut instaurée il y a trente ans pour préserver la qualité des paysages et de l’environnement côtier. Le 16 février, lors d’une conférence de l’Iddri, le “père” et co-rédacteur de cette loi, le haut fonctionnaire Lucien Chabason, est revenu sur son bilan. Dans notre revue mensuelle Droit de l’environnement, il a également livré en janvier quelques réflexions, souhaitant notamment à cette loi de “se bonifier avec l’âge”.


Gérer un bien commun

Adoptée à l’unanimité, en pleine vague de décentralisation, la loi Littoral est aux yeux des connaisseurs plus une loi transversale d’aménagement et de mise en valeur des activités qu’une loi de protection de l’environnement. “Mais quelque part nous avons préfiguré avec elle ce que pouvait être une gestion durable de ce bien commun qu’est le littoral”, poursuit celui qui fut par ailleurs l’artisan du premier Plan national de l’environnement en France. A l’époque, un tel effort législatif n’est pas parti de rien. Il fut précédé d’une suite d’instructions et de circulaires, dont celle sur les concessions de plages naturelles, qui impose un libre accès à la mer et le long du rivage.


Une loi vivante

Pour dresser le bilan de la loi Littoral, il cite quelques chiffres et outils plus ou moins directement liés : les 4.600 km, dont plus d’un tiers au titre de la servitude, de sentiers du littoral ; les sites classés, réserves naturelles, les 160.000 hectares protégés par le Conservatoire du littoral, etc. Mais là où il reconnaît que cette loi Littoral est “bel et bien vivante”, c’est au vu des réactions, des remous qu’elle continue de susciter. Car on le sait : l’imprécision de ses dispositions génère des crispations. Dans un rapport publié il y a deux ans, les sénateurs Odette Herviaux et Jean Bizet ont détaillé la logique de contentieux, son application sujette à de fortes interprétations et le problème que pose “sa territorialisation inachevée”.

En outre, d’autres lois lui ont apporté quelques retouches. “Mais très légères, les lois Brottes et celle sur la transition énergétique au sujet du développement sur le littoral des énergies renouvelables”, souligne Arnaud Gueguen, chargé de mission au groupement d’intérêt public (GIP) Littoral Aquitain, structure unique en France de protection du littoral, qui associe à la fois l’Etat et des collectivités.

Et les enjeux émergents ?

Des autres enjeux émergents, comme l’adaptation aux changements climatiques face à l’érosion qui grignote les côtes, cette loi ne traite évidemment pas. “Elle fut conçue à une époque où la conception dominante était de se défendre contre la mer”, conclut Lucien Chabason.

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