Les dépenses du secteur communal, proches de 150 Md€ par an, se caractérisent par leur dynamisme et leur grande disparité de montant par habitant. La Cour, dans une enquête réalisée à la demande de la commission des finances de l’Assemblée nationale, a mis au point un modèle économétrique afin d’analyser les déterminants de la dépense locale. Menée pour la première fois à l’échelle des ensembles intercommunaux, cette étude met notamment en lumière l’importance des dotations dans l’explication des inégalités de dépense par habitant entre collectivités comparables. La Cour formule trois recommandations : mener à son terme la réforme des concours forfaitaires de l’État, poursuivre l’intensification des dotations de péréquation en mesurant plus systématiquement leurs impacts, et revoir les critères d’éligibilité et de calcul des dotations, en tenant compte de la nouvelle carte des intercommunalités au 1er janvier 2017.
Des inégalités figées
Dans un communiqué, l’Association des Maires ruraux de France salue le travail de la Cour des Comptes qui, écrit-ell, “confirme l’analyse ancienne et éprouvée quotidiennement par les maires ruraux, grâce à l’analyse des disparités, tant des ressources des communes que des concours financiers de l’Etat. Ce rapport vient ajouter, à sa manière, un réquisitoire pro domo en faveur d’un besoin urgent de réformer la Dotation globale de fonctionnement (DGF).”
Ces travaux mettent en effet en évidence l’effet de redoublement que peuvent avoir les différentes dotations forfaitaires sur les inégalités initiales de richesse fiscale, contribuant à figer les inégalités de dépenses par habitant qui en découlent. Il met très clairement en évidence les effets des concours financiers de l’État sur les inégalités de ressources et de dépenses au sein du bloc communal, appelant à la mise en œuvre des réformes des composantes figées des dotations forfaitaires.
Des dépenses et pas d’économies
Le rapport pointe l’aspect pervers de la baisse uniforme des dotations et le fait de ne pas lui avoir donné un effet péréquateur. L’AMRF constate ainsi que “la notion de centralité est peu pertinente pour être retenue comme pivot de la répartition de la DGF.”
La Cour des Comptes souligne par ailleurs que les incitations budgétaires pour encourager le développement de l’intercommunalité ont favorisé l’engagement de dépenses nouvelles plutôt que la recherche d’économie d’échelle. Pour l’AMRF, “Ce rapport constate utilement : – que les dépenses par habitant de collectivités comparables varient du simple au triple ; – que la variable ressource explique la disparité de dépenses ; – que les dotations expliquent pour plus de moitié la variable de ressource ; en matière de péréquation, ce rapport retient toute l’attention des maires ruraux puisqu’il valide le principe d’une égalité de traitement des citoyens (entre ruraux et urbains notamment) et une meilleure péréquation.”
Les “charges de ruralité”
La Cour des Comptes montre également que les dotations permettent aux communes les plus pauvres de s’en sortir, mais aussi qu’elles sont loin de compenser les inégalités, en particulier pour les communes les plus riches. Pour autant, le rapport montre les limites de la péréquation actuelle puisqu’on observe une inversion de tendance des effets escomptés. “Ceci montre qu’il faut entièrement revoir la péréquation avec un mécanisme simple et basé sur des indicateurs consensuels (potentiel fiscal et/ou richesse des habitants)” explique l’AMRF qui demandent à ce que les prochains travaux intègrent la nouvelle notion de “charges de ruralité” autour notamment de la longueur des réseaux. Ainsi, le surcoût de l’entretien ou la rénovation des réseaux d’eau et d’assainissement pour répondre aux normes nouvelles et sur les obligations assumées par les communes rurales au profit du pays en matière de gestion de l’espace (maîtrise de l’urbanisation pour assurer la production agricole, entretien des paysages, préservation qualité de l’eau, de l’air) seront des pistes à étayer dans les prochains travaux. L’AMRF invite donc la Cour des Comptes à se saisir de ces questions de manière urgente.