Le transport fluvial boit-il la tasse ? 

Le constat est connu : la France dispose du plus grand réseau navigable d’Europe mais le fret n'y est guère à la hauteur. En commission à l'Assemblée nationale, une table-ronde avec des acteurs du secteur vient d'éclairer la situation.

Pour évaluer le trafic, le secteur a pour boussole la tonne-kilomètre (t-km). La pertinence de cette unité de mesure est contestée mais elle aide à se situer par rapport aux voisins européens. Une comparaison peu flatteuse : avec autour de sept milliards de t-km en 2018, la France transporte huit à neuf fois moins de marchandises par voie d’eau que l’Allemagne, bien moins aussi que les Pays-Bas et s’est fait depuis des années doubler par la Belgique et la Roumanie. “Nous sommes à la traîne, c’est de pire en pire chaque année. Il y a un gros problème de moyens. Dans mon département, la Meuse, doté de deux canaux, cela prend l’eau de toutes parts ! Les communes qui ont misé sur la voie d’eau n’ont plus que leurs yeux pour pleurer : les péniches n’y transitent que six mois par an”, déplore le député Bertrand Pancher. 

Tel n’est pas le constat de Voies navigables de France (VNF) qui, dans son dernier bilan, estime que le trafic est resté “robuste malgré des événements climatiques exceptionnels”. Crues importantes, étiages d’amplitude, la navigation sur le Rhin a même été stoppée pendant un mois : “Du jamais vu, cela ne sera pas sans conséquences, surtout sur l’économie allemande”, commente Thierry Guimbaud, directeur général de VNF. “Sortons des postures et du ‘tout va mal’, il y a de bonnes nouvelles, sur l’axe Rhône notamment, le report modal en utilisant la voie d’eau à partir de Marseille s’accroît nettement”, positive Nicolas Trift, sous-directeur des ports et du transport fluvial de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) du ministère des Transports. Des logisticiens y relancent toutefois des trafics : “Ce sont eux qui ont la main, il faut qu’ils intègrent mieux le fluvial dans leur politique d’offre”, défend Nicolas Trift.

Pour gagner en attractivité, il reste du chemin à faire. “Derrière le discours unanime sur ses vertus apparaissent une méconnaissance du secteur et une vision souvent ludique de la voie d’eau. À Paris y compris, on a du mal à faire entendre les enjeux économiques. Il faut faire œuvre de pédagogie, que les collectivités prennent conscience de sa pertinence et intègrent ce mode dans leurs documents d’urbanisme”, propose François Philizot, délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine. Quant au tourisme fluvial il est, lui, en bonne santé. Chiffre mis en avant : dix millions de touristes par an empruntent la voie d’eau à un moment donné durant leur séjour. Thierry Guimbaud invite les acteurs impliqués à renforcer “l’approche globale qui est essentielle pour cette dynamique qui ne se bâtit pas seule mais à terre avec les collectivités”.

Laisser un commentaire