Le Conseil d’Etat assure pour la première fois la sanction du principe de non-régression

Par un arrêt rendu le 8 décembre, le Conseil d’Etat tient pour la première fois le rôle de garant du principe de non-régression, selon lequel "la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment".

 

Ce nouveau principe directeur de valeur législative – inscrit à l’article L.110-1 du code de l’environnement par la loi Biodiversité de 2016 – s’impose en effet au pouvoir réglementaire. La haute juridiction en fait ici une application au champ des études d’impact. En l’espèce, la fédération Allier Nature mettait en cause le décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 réformant les règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes.
Pour rappel, cette refonte répond à un objectif de diminution du nombre d’études d’impact grâce au développement des examens au cas par cas effectués par l’autorité environnementale et à un ciblage de l’évaluation environnementale sur les projets les plus “impactants”, au travers d’une nomenclature [en annexe de l’article R. 122-2] rénovée par le décret attaqué.

 

Effet cliquet

Etait plus précisément visée ici la rubrique 44 du tableau annexé, relative aux “équipements sportifs, culturels ou de loisirs et aménagements associés”, en particulier les projets de pistes de sports motorisés.
La nomenclature issue du décret litigieux supprime l’évaluation systématique pour ces types de projets par basculement vers la procédure d’examen au cas par cas et, par voie de conséquence, exempte totalement d’évaluation les projets de terrains pour la pratique motorisée de moins de 4 hectares et d’équipements sportifs et de loisirs susceptibles d’accueillir moins de 5.000 personnes.
Pour le Conseil d’Etat, une réglementation soumettant certains types de projets à l’obligation de réaliser une évaluation environnementale après un examen au cas par cas alors qu’ils étaient auparavant au nombre de ceux devant faire l’objet d’une évaluation environnementale de façon systématique “ne méconnaît pas, par là-même, le principe de non-régression”. Dans les deux cas, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement font l’objet d’une évaluation environnementale.

En revanche, le raisonnement diffère s’agissant d’une réglementation exemptant de toute évaluation environnementale un type de projets antérieurement soumis à l’obligation d’évaluation après un examen au cas par cas. La méconnaissance du principe de non-régression est avérée dès l’instant où ce type de projets, “eu égard à sa nature, à ses dimensions et à sa localisation et compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment” est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine.

C’est bien le cas dans cette affaire, estime le Conseil, les aménagements affectés par ce changement de régime procédural étant “susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement”, notamment, comme le fait valoir la fédération requérante, “lorsqu’ils sont localisés dans ou à proximité de lieux où les sols, la faune ou la flore sont particulièrement vulnérables”. La haute juridiction annule en conséquence de la rubrique précitée (annexée à l’article R. 122-2) les mots “d’une emprise supérieure ou égale à 4 hectares” et “susceptibles d’accueillir plus de 5.000 personnes”, pour méconnaissance du principe de non-régression.

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