Le Conseil constitutionnel délimite l’assiette de la taxe sur les boues d’épuration

Saisi en mars dernier par le Conseil d'Etat d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par des représentants de l’industrie papetière, le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution l'article L. 425-1 du Code des assurances relatif au fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues d'épuration urbaines ou industrielles. Par sa décision du 8 juin 2012, le Conseil constitutionnel a toutefois émis une réserve d’interprétation tenant à l’assiette de la taxe sur les boues d'épuration destinée précisément à alimenter ce fonds.

L’élimination des boues d’épuration peut être réalisée par mise en décharge, incinération ou épandage sur des sols agricoles comme matière fertilisante lorsque les boues constituent des amendements organiques. La création d’un fonds de garantie est destinée à développer ce dernier débouché, fragilisé par la réticence de la profession agricole. Créé par la loi sur l’eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006, ce fonds permet en effet de garantir aux exploitants agricoles et aux propriétaires fonciers l’indemnisation des dommages écologiques liés à l’épandage qui n’étaient pas prévisibles et ne sont pas pris en charge au titre des contrats d’assurance de responsabilité civile du producteur des boues épandues. La taxe afférente est due par les collectivités (boues urbaines) – ou le cas échéant par les entreprises délégataires – et les exploitants du secteur de l’industrie alimentaire ou du papier qui font construire pour leurs besoins propres une station d’épuration (boues industrielles).

 

Base d’imposition

Un décret du 18 mai 2009 a par ailleurs défini la base d’imposition de la taxe, laquelle réside dans la quantité de matière sèche de boues produites annuellement. Or, selon les requérants, en décidant ainsi d’asseoir la taxe sur la quantité de boues d’épuration produites et non sur la quantité de boues épandues, le législateur a opté pour un dispositif excédant l’objectif poursuivi, à savoir la promotion de l’épandage des boues et l’indemnisation de certains préjudices résultant de cet épandage. Certaines industries seraient en effet placées dans l’impossibilité tant juridique que technique d’éliminer par voie d’épandage la totalité des boues qu’elles produisent. Ce faisant, l’assiette de la taxe sur les boues d’épuration méconnaîtrait selon les requérants l’égalité devant les charges publiques. 

Il s’est agi pour le législateur de privilégier l’élimination des boues d’épuration au moyen de l’épandage, relève le Conseil. Sur ce point, il n’appartient pas au juge constitutionnel de remettre en cause le choix opéré par le législateur et d’en apprécier en particulier la pertinence sur le plan environnemental. Le Conseil retient en revanche le grief de l’inadéquation de la taxe à son objet pour émettre une réserve d’interprétation. Il estime que la différence de traitement instituée entre les boues susceptibles d’être épandues – au regard de la réglementation – pour lesquelles le producteur a obtenu l’autorisation d’épandre et les autres déchets produits non soumis à taxation car éliminés par stockage ou incinération est en rapport direct avec l’objet de la taxe. Tel n’est pas le cas, pour le Conseil, s’agissant des boues susceptibles d’être épandues mais pour lesquelles le producteur n’a pas l’autorisation d’épandre, notamment au titre du plan départemental d’épandage. Au regard du principe d’égalité devant les charges publiques, ces dernières ne sauraient en conséquence être soumises à taxation, conclut le Conseil.

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