La liberté d’expression a-t-elle des limites ?

Le 2 octobre prochain, Légipresse organise son Forum annuel autour du thème "Y a-t-il des abus licites de la liberté d’expression". Plusieurs débats seront organisés tout au long de la journée dont certains devraient intéresser les élus au plus haut point.

L’affaire “Dieudonné”, dont les provocations répétées ont conduit à la décision du Conseil d’État confirmant, en référé, l’interdiction du spectacle “Le Mur”, a posé magistralement la question du droit à l’humour et des limites du droit à la liberté d’expression. S’il a valeur constitutionnelle et se trouve consacré à l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, le droit à la liberté d’expression n’est pas absolu et doit se concilier avec d’autres principes d’égale valeur, ce que les juges rappellent régulièrement.

L’expression de propos racistes discriminatoires entre, depuis l’adoption des lois Pleven de 1971 et Gayssot de 1990, dans le champ de la répression de la loi de 1881. Pour autant les récentes modifications législatives tendent à poser un régime spécial au sein de ce régime déjà spécial : prescription allongée d’un an, et régime de sanction plus répressif.

C’est enfin sur la question de la mise en œuvre des lois mémorielles, après l’intervention de la loi Gayssot, qui a posé le délit de négationnisme, au regard des dernières décisions de la chambre criminelle de la Cour de cassation, de la Cour Européenne ou du Conseil Constitutionnel, qui mérite débat.


Vie privée des personnes publiques

Par ailleurs, l’actualité du droit de la presse offre de nouvelles illustrations quant à la protection de la vie privée des personnes publiques, politiques en particulier. La révélation de la liaison de l’actuel président de la République avec une autre personne que sa compagne officielle, dont les photographies ont été publiées et dévoilées au public, nous invite à nous interroger sur les informations qui relèvent du “débat d’intérêt général”, et qui méritent d’être rendues publiques, de celles qui relèvent de l’intimité d’une personne, même investie d’une fonction publique, et ne doivent pas être dévoilées sur la place publique. Quelle est l’évolution de la jurisprudence européenne et nationale sur ce sujet ? Les récentes décisions françaises semblent avoir intégré les critères fixés par la Cour européenne des droits de l’Homme.

La mise en balance de la protection de l’intimité de la vie privée de personnalités politiques et du droit du public à l’information a fait l’objet de récentes décisions de justice au sujet des écoutes réalisées au domicile de Liliane Bettencourt, ou encore des enregistrements clandestins de conversations privées du couple Sarkozy, mis en ligne sur Internet. Jusqu’où peut aller l’investigation journalistique ?

 

Et Internet dans tout ça ?

Enfin, comment évoquer l’évolution du droit à la protection de la vie privée et le droit à l’information du public sans évoquer l’arrêt de la CJUE du 13 mai 2014 ? La Cour de justice de l’Union européenne impose aux moteurs de recherche de supprimer de la liste de résultats, affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne, des liens vers des pages web, contenant des informations relatives à cette personne, dès lors qu’elle en fait la demande.

Il incombe désormais aux moteurs d’examiner le bien-fondé de chaque demande, en se faisant le juge de l’équilibre entre droit à l’information du public et protection de la vie privée. Selon quels critères ? Le déréférencement d’articles constitue-t-il une atteinte à la liberté de la presse ? Les rencontres intervenues entre le G29 et les acteurs concernés ont-elles permis de finaliser les modalités d’exercice de ce “droit à l’oubli” sur Internet ? Comment le règlement européen sur la protection des données en cours de discussion appréhende-t-il la question ?

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