Agriculture urbaine : les quartiers populaires fertilisent leurs projets

Parmi les 27 premiers lauréats de l’appel à projets « Les Quartiers Fertiles », lancé par l'Agence nationale de rénovation urbaine, figurent des projets de micro-fermes ou de renaturation portés par des villes moyennes pour leurs quartiers prioritaires. Focus sur quatre d’entre eux.

Deux hectares de parcelles maraîchères au pied des tours de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), voilà pour le décor, résolument détonnant dans ce paysage de béton, que l’Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) a choisi pour dévoiler ce 7 décembre la première promotion de 27 lauréats de l’appel à projets « Quartiers Fertiles ». L’effort de l’établissement pour déployer plus massivement l’agriculture urbaine dans les territoires en renouvellement urbain, afin aussi d’y panser certaines plaies bien connues (enclavement, manque de services de proximité), commence à porter ses fruits. « Ils ont travaillé comme des chefs pour faire remonter et appuyer des projets conciliant rénovation et agriculture urbaines », ont tenu à saluer en s’y déplaçant durant l’entière matinée les deux ministres Nadia Hai (chargée de la Ville) et Julien Denormandie (Agriculture et alimentation).

Organisé en trois vagues, l’appel à projets ambitionne de soutenir 100 quartiers : aux 27 retenus s’en ajouteront une soixantaine d’autres, en cours d’instruction et révélés début 2021 (on y trouvera même des projets… d’aquaculture en pleine ville), puis une troisième promotion au printemps 2021, « l’idée étant de permettre aux exécutifs municipaux et intercommunaux renouvelés de s’inscrire dans la démarche », explique Olivier Klein, président de l’Anru et maire de la voisine Clichy-sous-Bois. Un premier tour de table avait permis de budgéter l’opération à 21 millions d’euros mais « via le volet agricole du plan de relance, 13 autres millions y sont alloués », décompte Julien Denormandie. Convaincu de l’utilité de ces projets « non seulement nourriciers mais vecteurs de solidarité, valorisant le vivant face à l’inertie du béton », le ministre en a profité pour pousser un coup de gueule « contre tous ceux qui cherchent à politiser l’Anru en en faisant le bouc-émissaire pour divers travers, ce qui revient à dénigrer ce travail de terrain qu’elle réalise avec force et détermination ».

A la tête de l’Anru, Olivier Klein, souligne l’intérêt florissant des entreprises pour le potentiel de développement des circuits courts en pleine ville.
Tisser du lien social, renaturer les villes et sensibiliser les enfants, le ministre Julien Denormandie ne tarit pas d’éloges pour les vertus de l’agriculture urbaine.

Parmi les 27 lauréats qui bénéficieront d’un appui technique et financier, outre des projets portés dans des métropoles – une chèvrerie dans une cité des quartiers nord de Marseille ; un projet multi-sites nécessitant des études de sols à Valenciennes – les villes moyennes ont la part belle. Par exemple à Nevers (Nièvre, 33 000 habitants), il s’agit de panacher sur 10 hectares d’un quartier prioritaire de la politique de la ville des espaces de cueillette, de production maraîchère avec une suite de jardins partagés et familiaux. Le projet démarre et s’étale jusqu’en 2026. Dès 2023, la ville et l’agglomération d’Annemasse (Haute-Savoie, 35 000 habitants) auront pour leur part inauguré leur ferme urbaine sur deux parcelles représentant 3 700 m2 de surface agricole.

Retour en Ile-de-France avec, en Essonne, la municipalité d’Épinay-sous-Sénart qui veut apporter à ses 12 500 habitants « une réponse locale au problème d’accès à des denrées de qualité ». Elle implantera notamment des serres de production sur le toit d’un centre-commercial. Enfin, sous le soleil martiniquais de Fort-de-France, c’est un ancien site militaire qu’une association et la ville sont en train de convertir en site agricole, exploité dès l’an prochain. « Tous ces beaux projets n’ont évidemment pas vocation à se substituer aux circuits classiques de production mais bien à les compléter, par le biais de circuits courts à forte valeur sociale, pédagogique et environnementale. Relocaliser des productions est aussi possible : on peut produire des champignons de Paris en Ile-de-France ! Les territoires où ces initiatives prennent ne manquent pas, tâchons maintenant de les démultiplier », a conclu Julien Denormandie.

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