Affichage publicitaire : un projet de décret affole les associations de défense du paysage

Autorisation des panneaux scellés au sol dans les communes de moins de 10 000 habitants, révision à la hausse de la taille maximum des dispositifs publicitaires… Un projet de décret d'application de la loi Macron actuellement en concertation inquiète les associations de défense du paysage.

« Les discussions ont uniquement portées sur les aspects économiques. Nous n’avons pas parlé d’environnement, d’impact sur les paysages ou les populations. Les remarques des associations ont été “notées”, mais je ne suis pas sûr que ce genre de réunion serve à grand chose », regrettait l’acteur Olivier Saladin, engagé depuis une dizaine d’année dans l’association Paysage de France, à la sortie de la réunion de concertation organisée ce jeudi 3 septembre par le ministère de l’Écologie.

Le projet de décret qu’Environnement Magazine s’est procuré devrait être mis en consultation publique dans les semaines à venir et publié avant la fin de l’année. Il a deux objets : préciser le régime dérogatoire pour les dispositifs publicitaires prévu par la loi « pour la croissance et l’égalité des chances économiques » dans l’emprise des équipements sportifs et simplifier la réglementation actuellement applicable aux publicités et enseignes.

Mais, dénoncent plusieurs associations, le gouvernement en profite pour revoir la réglementation en faveur des afficheurs. « Si ce décret est publié, des panneaux scellés au sol pourront être installés dans des communes de moins de 10 000 habitants, alors que c’est interdit depuis 35 ans. Et le comble, c’est que cette mesure consiste à défaire en partie ce que le ministère avait obtenu en 2012 contre l’afficheur JC Decaux à la suite d’un arrêt en Conseil d’État. Celui-ci confirmait que les panneaux scellés au sol ne peuvent être installés que dans les communes de moins de 10 000 habitants appartenant à une unité urbaine de plus de 100 000 habitants », décrypte Pierre-Jean Delahousse, président de Paysages de France. Aujourd’hui, le projet de décret les autoriserait « à proximité immédiate » des « centres commerciaux situés dans les agglomérations de moins de 10 000 habitants appartenant à une unité urbaine comprenant au moins une agglomérations communales de plus de 10 000 habitants »…

Le décret modifie par ailleurs le mode de calcul de la surface maximale des panneaux, en excluant de celle-ci « les éléments de support, de fonctionnement et d’encadrement ». Avec pour conséquence, le retour de fait des panneaux de 16 m² alors que les dispositions issues du Grenelle de l’affichage en limitait la surface à 12 m²… « Cette mesure est scandaleuse et aberrante. Un décret ne peut pas modifier un mode de calcul définit dans une loi, seulement le préciser ou le compléter. Le Conseil d’État censurerait forcément cet article », assure Pierre-Jean Delahousse.

« Il est aberrant que le ministère de l’Écologie propose d’autoriser en septembre des panneaux huit fois plus grands que ceux devenus interdits au mois de juillet. L’urgence est de réhabiliter les entrées de ville et non de les enlaidir encore davantage ! », ajoute Cyril Ronfort, président d’Agir pour les paysages dans un communiqué. Depuis le 13 juillet, en effet, la majorité des pré-enseignes dites dérogatoire, qui pullulent au bords des routes de France, sont théoriquement interdites.

Le décret oblige enfin la collectivité à consulter les professionnels de l’affichage pour l’élaboration des règlements locaux de publicité. « Mais rien n’est prévu pour les associations de quartier et les riverains des panneaux publicitaires », regrette France Nature Environnement qui appelle à la « remise à plat immédiate de ce projet ».

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