Un décret définit la “règle d’or” financière de SNCF Réseau

Un décret publié le 31 mars fixe les règles de financement des investissements de SNCF Réseau, dans l'optique de freiner l'endettement de l'opérateur ferroviaire. Il fixe notamment le niveau plafond au-delà duquel SNCF Réseau ne peut s'engager, obligeant dès lors l'Etat, les collectivités territoriales ou tout autre demandeur à financer l'intégralité des investissements. 

 

Près de trois ans après le vote de la réforme ferroviaire, un décret publié ce 31 mars précise enfin les règles de financement des investissements de SNCF Réseau. Un dispositif d’encadrement qualifié de “règle d’or” a en effet été instauré par l’article L.2111-10-1 du Code des transports. Mais le décret d’application était toujours en attente. Cet article – modifié par la loi Macron du 6 août 2015 – fixe les règles de financement des investissements de maintenance et de développement du réseau ferré national, dans l’objectif clair de freiner l’endettement de SNCF Réseau (+1,5 milliard d’euros depuis début 2016).

Il renvoie à un décret le soin de définir les modalités d’application de cette “règle d’or”, notamment le mode de calcul des éléments du ratio et son niveau plafond. Théoriquement, cette règle interdirait à SNCF Réseau de financer à perte des investissements de développement du réseau aux côtés de l’Etat et des collectivités, comme le Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO). Principale conséquence : les collectivités devront mettre davantage la main au pot pour obtenir leurs lignes.
Pour rappel, en cas de dépassement du niveau plafond du ratio (fixé à 18 par le décret, c’est-à-dire au niveau maximum autorisé par la loi), SNCF Réseau ne peut participer au financement de ces investissements qui, pour être réalisés, doivent faire l’objet d’un financement intégral par l’Etat, les collectivités territoriales et/ou tout autre demandeur.
En deçà du niveau plafond du ratio, une participation financière de SNCF Réseau est possible sous réserve que les demandeurs publics apportent les concours financiers propres à éviter toute conséquence négative sur les comptes de SNCF Réseau à l’issue de la période d’amortissement des investissements projetés. En revanche, ne sont pas soumis à l’application de cette “règle d’or” les investissements de maintenance pour lesquels la loi renvoie au contrat conclu entre l’Etat et SNCF Réseau le soin de fixer les modalités de financement.

Formé autour de cinq articles, le décret définit les catégories d’investissements soumises à son application. La définition des investissements de développement retenue dans le décret correspond à une logique d’extension de l’étendue du réseau et intègre, à ce titre, les projets de réouverture de ligne. Suivant sur ce point l’avis de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), elle intègre également les investissements sur le réseau existant dont la réalisation est intrinsèquement liée à la réalisation du projet de ligne nouvelle.

 

Quid de la pertinence socio-économique des projet ?

Pour le gendarme du rail, la règle d’or “ne constitue pas (…) une protection absolue contre les risques financiers encourus par le gestionnaire d’infrastructure“. Il ne s’agit pas d’un mécanisme de sélection des projets d’investissement, rappelle l’Arafer. Ce mécanisme est ainsi “sans lien avec l’appréciation qui peut être faite de la pertinence socio-économique du projet et n’emporte, en conséquence, aucune certitude quant à la meilleure orientation de la politique d’investissement au bénéfice du bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national“.
Ce dispositif n’est pas sans risque pour les financeurs publics dès lors qu’il peut mettre le gestionnaire d’infrastructure en situation de réaliser des investissements sans aucun apport financier de sa part, “ce qui constitue un mécanisme par nature peu incitatif à la maîtrise des coûts et des délais“.
La mission de suivi de la réforme ferroviaire – corapportée par le député UDI de la Meuse, Bertrand Pancher et le député PS de la Gironde, Gilles Savary (ancien rapporteur du projet de loi) – s’inquiétait en octobre dernier d’une “nouvelle fuite en avant de grands projets d’investissements, de nature très politique, à l’évaluation économique et sociale approximative, au risque hautement probable d’un nouveau dérapage de la dette. (…) A peine fixée, cette règle d’or est aussitôt transgressée !“, s’alarmait également Hervé Maurey, le président la commission sénatoriale qui a auditionné Alain Vidalies en automne dernier, se référant à la promesse de SNCF Réseau d’investir dans le projet CDG Express.

Une clause de rendez-vous doit intervenir trois ans après la signature du contrat entre l’Etat et SNCF Réseau. Dans le cas où interviendrait une reprise de la dette de SNCF Réseau par l’Etat, l’Arafer “invite à revoir le niveau du ratio en conséquence afin de garantir le même effort de maîtrise de l’endettement du gestionnaire d’infrastructure”.
Ce texte est accompagné d’un second décret modifiant le décret n° 97-444 du 5 mai 1997 relatif aux missions et aux statuts de SNCF Réseau , afin d’en tirer notamment les conséquences sur les compétences du conseil d’administration.  

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