Territoires de projets : les clés d’un partenariat gagnant-gagnant

Le Sénat vient de publier un rapport d'information à partir des actes d'une table ronde sur les pôles d'équilibre territoriaux et ruraux (PETR) et les pôles métropolitains organisée en décembre dernier. Le document met en avant la souplesse de ces structures pour fédérer des actions autour d'un territoire et de projets communs. Mais ils ne doivent pas contribuer à étendre le mille-feuilles territorial, préviennent les sénateurs.

 

Les sénateurs Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin) et Charles Guené (Haute-Marne) viennent de publier, ce 23 juin, un rapport d’information, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, à partir des actes de la table ronde sur les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux (PETR) – ex-pays – et les pôles métropolitains organisée en décembre 2016. Ces territoires de projets, souvent méconnus du grand public, offrent aux collectivités une structure administrative à la fois souple et pertinente sur une palette d’actions extrêmement variée : transport, santé, urbanisme, développement économique, patrimoine culturel…

Contrairement aux nouvelles intercommunalités “XXL”  imposées par la loi, la création des PETR et des pôles métropolitains ne relève d’aucune obligation mais d’un choix délibéré des EPCI qui souhaitent fédérer leurs actions autour d’un territoire et de projets communs. Ces structures ont ainsi “pour objectif de s’adapter aux besoins des habitants alors que les dernières réformes ont plutôt eu tendance à demander à nos concitoyens de s’adapter aux nouvelles structures territoriales !”, souligne le rapport. 
 
 
Espaces de mutualisation

Cette table ronde met en lumière des réussites concrètes au service des citoyens dans des domaines traditionnels (santé, agriculture, foncier, développement culturel, transition énergétique, développement économique …) et parfois plus spécifiques (filière bois, réhabilitation de l’immobilier de loisirs…). C’est notamment le cas du PETR du pays du Ruffécois avec la création d’un office de tourisme de pôle ou encore de celui du pays d’Epinal sur le bois. Les pôles se sont aussi investis dans les nouvelles technologies et le développement du numérique. Le pôle métropolitain du Sillon lorrain a ainsi obtenu la labellisation “French Tech”, tandis que celui de Strasbourg-Mulhouse-Colmar a été labellisé “écosystème remarquable – MedTech” reconnaissant son excellence en matière de techniques médicales innovantes. Avec pour mot d’ordre la mutualisation, les pôles sont apparus “comme des structures pertinentes pour réaliser des opérations en commun que les communes ne pouvaient plus financer de manière isolée et non concertée”. 

Certains PETR ont même permis d’avancer plus rapidement sur l’élaboration des schémas de cohérence territoriale (Scot) : ” De nombreux PETR sont désormais porteurs de Scot”, relève le rapport. De même, plusieurs PETR, tel le pays Charolais brionnais, ont pris la décision de créer un service d’urbanisme mutualisé, en cohérence avec leurs compétences liées à la planification des Scot et à la qualité des paysages. De leur côté, les pôles métropolitains ont permis “d’offrir plusieurs services aux habitants de collectivités ne disposant pas de la capacité financière suffisante pour couvrir tant les nouvelles charges transférées par l’Etat que les nouveaux besoins exprimés par leur population ». 
 
 
Eviter l’écueil du mille-feuilles territorial

Pour autant, ces projets de territoire n’échappent pas à la crainte d’une énième extension du mille-feuilles territorial. Pour éviter cet écueil, il est donc essentiel de bien vérifier en amont de leur création leur pertinence au regard des structures préexistantes. Le pôle ne doit pas être perçu comme une instance administrative supplémentaire “mais comme une structure porteuse d’un projet que nulle autre organisation administrative existante ne peut porter”, insiste le rapport. C’est ainsi que les PETR eux-mêmes sont parfois appelés à fusionner et/ou à intégrer de nouvelles intercommunalités. Par ailleurs, la souplesse des territoires de projets se heurte parfois “aux rigidités de la cartographie administrative lorsqu’il s’agit de contractualiser, de se restructurer ou de trouver de nouveaux partenaires”. Cette nécessaire interaction entre les régions et les territoires de projets a été soulignée lors de la table ronde. Mais la présence des départements ou des régions fait débat et “doit rester à l’initiative des acteurs locaux en étant une faculté d’association et en aucun cas une obligation susceptible de porter préjudice à la lisibilité des compétences respectives”, a rappelé Marie-Françoise Perol-Dumont, sénatrice de la Haute-Vienne. C’est donc bien la contractualisation qui est au centre de ce dispositif “gagnant-gagnant” à travers les contrats de ruralité (conclus entre l’Etat et les présidents de PETR ou d’EPCI) , les contrats de plan Etat-Région (CPER) ou encore les programmes européens (Leader). 

Aux frontières de la “rurbanité”

Les différents intervenants de la table ronde ont pu démontrer que le caractère majoritairement rural des PETR “n’empêche nullement les PETR de se structurer parfois autour de pôles urbains locaux”. De la même manière, les pôles métropolitains se sont agrandis à d’autres intercommunalités et englobent des zones rurales plus importantes que par le passé.Cependant certaines parties du territoire ne sont couvertes ni par un PETR, ni par un pôle métropolitain. La gestion de ces zones à la limite du monde rural et du monde urbain plaide pour une plus grande souplesse des règles administratives même si “l’idée d’un texte unique pour les territoires de projets ne fait pas encore l’unanimité”.
 
Le rapport recommande également l’élaboration d’outils adaptés “favorisant au mieux les méthodes de coopération, voire de meilleure intégration” de ces zones interstitielles éloignées des pôles. C’est notamment l’objectif poursuivi par les contrats de réciprocité ville-campagne expérimentés à Toulouse, avec le pays Portes de Gascogne, ou à Brest, avec le pays Centre-Ouest Bretagne. 

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