La première Semaine de la chaleur renouvelable vient de se terminer. Ces trois journées d’échanges et de visites d’installations du 4 au 6 décembre à Paris et en région ont réuni près de 600 participants. Les élus locaux, industriels et experts présents ont pu confronter leurs expériences et évoquer d’anciens ou de nouveaux outils relevant autant du diagnostic et de la planification territoriale – avec par exemple les schémas directeurs de réseaux de chaleur qui font l’objet d’un suivi et recensement précis – mais aussi de la sensibilisation et de l’accès à l’information avec la mise en ligne imminente d’une cartographie par Via Sèva pour faire connaître et “aider ces réseaux à toucher de plus près leurs usagers”.
Un facteur 2 de développement
Dans la filière, un léger regain d’optimisme est de mise après la “bonne nouvelle” actée dans la feuille de route énergétique dévoilée la semaine dernière par le gouvernement d’une augmentation des moyens du fonds Chaleur qui, de 245 millions d’euros en 2018, doit passer à 315 millions d’euros l’an prochain puis 350 en 2020. De 2009 à 2017, ce dispositif a financé 829 projets de réseaux selon ce bilan. Pour Pascal Roger, président de la Fédération des services énergie environnement (Fedene), “l’aide de l’Ademe renforce l’attractivité économique de cette solution mais ne suffit pas à remonter la pente”. Pour atteindre les objectifs fixés, le rythme de développement devrait être deux à trois fois plus soutenu que celui constaté ces dernières années. La vulnérabilité économique des projets aux cours des énergies fossiles et au faible prix des combustibles fossiles a handicapé leur développement. Pire, dans les réseaux existants, des clients inquiets, des copropriétés notamment, se sont déraccordés pour repasser au gaz. Durant ces trois jours a été pointé le manque de connaissance du sujet chez les acteurs et bureaux d’étude intervenant auprès des propriétaires et syndicats de copropriété qui, bien souvent, ne jurent que par le gaz.
Sortir de l’immobilisme
Pour convaincre les collectivités de densifier des réseaux existants, d’y raccorder de nouveaux bâtiments – à Paris par exemple des milliers d’entre eux sont toujours dotés de chaudières au fioul – l’Ademe, avec ses directions régionales, est prête à prendre son bâton de pèlerin. “Il nous faut aller chercher des projets sur les territoires”, motive son président Arnaud Leroy. Et faire preuve d’innovation dans l’approche. Nombre de villes, de taille moyenne notamment, ne sont toujours pas dotées d’un réseau de chaleur. “Nous les démarcherons plus systématiquement qu’avant avec l’appui d’Amorce et du Cerema. Le but est de rencontrer entre 60 et 80 collectivités par an”, précise Rémi Chabrillat, directeur productions et énergies durables à l’Ademe. “Nous apporterons notre savoir-faire et notre expertise pour aider à transformer cette hausse du budget fonds chaleur en réels projets pertinents et durables”, confirme Nicolas Garnier, délégué général d’Amorce.
Une énergie à dimension sociale
Lors d’un raccordement, le génie civil et les canalisations génèrent des coûts importants. Le choix de l’implantation est essentiel, la densité de consommation aussi : chaque mètre doit alimenter le plus de clients possible. D’où l’importance d’associer en amont les acteurs locaux et le secteur privé, les entreprises, commerces et hôtels de la ville ou du quartier pour se mettre autour de la table et vérifier si le seuil de rentabilité du projet a des chances d’être atteint. Sans oublier, dans l’habitat social, d’associer les habitants et locataires dans le cadre d’une consultation. Une majorité de logements desservis par des réseaux de chaleur sont en effet des logements sociaux. C’est le cas à Sevran, en Seine-Saint-Denis : “Dans ces projets, la dimension sociale est très forte. Nous avons remplacé il y a trois ans le fioul et le gaz par du bois pour alimenter notre réseau de chaleur desservant 4.800 habitants de quartiers Politique de la ville. Pour eux, l’énergie devient moins coûteuse. Cela contribue aussi à soutenir l’économie locale et à créer des emplois pour gérer la chaufferie biomasse et livrer le bois”, conclut lors d’une visite de site Jean-François Baillon, l’élu en charge des politiques de l’emploi et de l’insertion dans cette ville.
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