Le Premier ministre a confirmé ce 26 février son intention de ne pas suivre les recommandations du rapport Spinetta et de ne pas engager de fermetures de petites lignes. Il renvoie aux régions et territoires le soin de déterminer lesquelles d’entre elles doivent être ou non préservées. “Je ne crois pas qu’on puisse décider depuis Paris, sur des critères administratifs et comptables, de la fermeture de 9.000 km de petites lignes. Dans bien des territoires, le rail est en effet au cœur de la stratégie des régions pour le développement des mobilités”, a expliqué Edouard Philippe, lors de la présentation de la méthode et du calendrier de réforme ferroviaire. Dans un communiqué, Régions de France se réjouit de cette décision mais promet toutefois de rester vigilante sur le “financement de ce réseau capillaire nécessaire à l’irrigation des territoires, en particulier au respect des contrats de plan Etat-région (CPER) permettant sa rénovation”.
Un calendrier serré
La réforme ferroviaire s’annonce très sensible dans une SNCF aux mouvements sociaux en mesure de paralyser le pays. Pour adapter la société publique à la future concurrence à laquelle elle sera très vite confrontée, le Premier ministre souhaite voir transformer l’actuelle gouvernance du groupe en trois établissements publics – une organisation jugée “rigide et fragmentée” – en une société nationale à capitaux publics. “Je veux plus d’efficacité, un groupe véritablement intégré, des coûts alignés sur les standards européens (…) et que chaque euro qui finance le service ferroviaire soit dépensé efficacement”, a-t-il indiqué en citant comme modèle d’inspiration le voisin allemand Deutsche Bahn, préféré au modèle britannique. Pour l’aider dans sa mue, responsabiliser ses dirigeants et “sortir du piège d’une dette sans limite”, il demande à sa direction de lui présenter d’ici l’été prochain un projet stratégique d’entreprise. Celui-ci devra faire l’objet d’une concertation avec l’ensemble du corps social du groupe. Sa feuille de route et ses modalités doivent être présentées d’ici la mi-mars. Un calendrier très resserré, donc, et des annonces d’ores et déjà musclées quoique attendues : le gouvernement a ainsi décidé d’en finir avec le statut de cheminot pour les nouveaux embauchés.
Droit comme un statut
Ce sujet récurrent était pointé dans le rapport Spinetta. Selon ce dernier, “le groupe public ferroviaire a continué de recruter au statut entre 3.500 et 4.500 personnes par an sur les quinze dernières années” et “ce recrutement “au cadre permanent” reste la règle ; “l’embauche de contractuels l’exception”. Une base, un socle législatifs existent depuis quatre ans, auquel l’entreprise a visiblement peu recours, d’où l’idée d’une disposition législative pour forcer l’arrêt de l’embauche au statut. Pour Spinetta, faire évoluer ces règles statutaires permettrait à la SNCF d’être plus agile dans un monde concurrentiel en transformation rapide, et donc “de rester dans le marché et de ne pas subir un déclin progressif de ses activités”. Cette forme de recrutement alimente en effet, selon lui, “un régime qui pèse sur les coûts de l’entreprise, sur son dynamisme, sur l’emploi (…), bref ne pas évoluer, ce serait se condamner à voir disparaître progressivement les embauches, celles au statut comme les autres”. L’évolution statutaire se justifierait par ailleurs dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, car “il serait inéquitable de ne pas traiter la SNCF de la même façon que les nouveaux opérateurs qui se verront transférer ces règles sous le régime des accords collectifs”. Enfin, elle doit permettre à l’entreprise le recours à des procédures de ruptures collectives – le statut le lui interdit – et aux plans de départs volontaires afin de mieux supporter des excédents d’effectifs coûteux et “qu’elle gère tant bien que mal”.
Une réforme menée par ordonnances
Morgan Boëdec
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