Le nouveau siège de la Région à déménagé à Saint-Ouen : comment se passe l’installation ?
Nous le vivons très bien, puisque nous avons choisi ce déménagement ! Pour nous, c’est tout un symbole. C’est quitter les quartiers chics de Paris, traverser le périphérique, travailler à la dynamique des quartiers en mutation et montrer notre volonté de lutter contre les fractures qui minent notre territoire. Déménager, c’était l’une de mes promesses de campagne, et je suis fière de voir que nous avons réussi en si peu de temps à tenir cet engagement. Le site que nous avons choisi à Saint-Ouen réunit énormément d’atouts : moderne, beau et confortable. Mais ce déménagement n’est pas juste un changement de site ou d’adresse postale. C’est beaucoup plus. C’est la volonté de transformer l’administration régionale, pour en faire une administration ouverte et innovante. Elle accompagne une réorganisation des services, qui étaient alors disséminés sur plusieurs sites, pour les décloisonner et favoriser le travail en commun en mode projets. Notre nouveau siège sera aussi un lieu de rencontres, entre les agents et avec les Franciliens. Il doit être le symbole d’une administration territoriale qui a pris le tournant de la transition numérique et écologique. A Saint-Ouen, le travail est aussi plus collaboratif, nous sommes d’ailleurs la première administration française aménagée en open space ! Cet aménagement accompagne aussi une nouvelle organisation du travail, qui prend en compte la possibilité de faire du télétravail, jusqu’à 2 jours par semaine, une pratique que nous voulons favoriser dans notre région. Enfin, le regroupement des agents et des élus sur un même site permettra également de réaliser des économies substantielles. Le loyer au mètre carré sera divisé par deux. Autant d’économies qui seront réinvesties au bénéfice des Franciliens !
Concernant les futurs Jeux olympiques : quelles priorités s’est fixée la Région sur ce dossier ?
Les Jeux Olympiques vont nous permettre de changer le visage de l’Île-de-France. Ils sont un formidable accélérateur pour l’ensemble de nos projets et l’impact d’un tel événement sera considérable. Il faut que nous fassions de ces Jeux un moteur du développement des territoires. Bien sûr, les villes qui accueilleront les sites seront directement concernées. Mais les retombées seront bien plus vastes. Je ne prendrais qu’un exemple : le tourisme. Nous avions 83 millions de touristes en 2012. Nous tablons sur 108 en 2020 et 121 en 2030. Pour les accueillir, nous avons calculé que nous avions besoin de 20 000 nouvelles chambres d’hôtel pour 2020. Le tourisme dans notre Région, c’est déjà 21 milliards d’euros de consommation et 500.000 emplois. Si nous nous organisons bien, tous les Franciliens pourront profiter de cette manne. Ce sera de plus une formidable vitrine du savoir-faire français. C’est donc valable pour le tourisme. Mais ce sera aussi le cas pour l’automobile, le numérique, la ville intelligente… Les entreprises, les pôles de compétitivité, les chambres de commerce. La Région, en tant que chef de fil du développement économique, est légitime pour faciliter les rencontres de ces acteurs avec le mouvement sportif qui porte la candidature.
L’impact d’un tel événement sera-t-il positif pour les communes franciliennes ?
Nous allons aussi faire en sorte que toutes les collectivités – et pas seulement celles où se dérouleront les Jeux Olympiques – puissent bénéficier d’équipements de proximité. Notre Région est d’ailleurs la moins bien dotée en équipement de proximité par rapport à sa population très jeune. Il faut donc investir. Nous allons mettre par exemple plus de 27 millions supplémentaires pour les lieux d’entraînement (aires de jeux, gymnases). Nous allons aussi, dans l’optique des Jeux paralympiques investir 10 millions de plus pour l’accessibilité.
Et enfin, les Jeux Olympiques vont aussi nous permettre de développer des valeurs auxquelles je suis personnellement très attachée : celles du fair-play et du dépassement de soi. Il faut que celles-ci passent les barrières du secteur sportif pour irriguer l’ensemble de la société ! Et quelle meilleure occasion que les Jeux Olympiques pour y parvenir ?
Modernisation des lycées franciliens : où en est le chantier de la sécurisation ?
Avec les événements tragiques qui ont frappé – entre autres – notre Région ces dernières années, nous avons fait de la sécurité des Franciliens une priorité. C’est pour ça qu’en 2017 nous avons doublé le budget régional dédié à la sécurisation des lycées publics : il s’élève désormais à plus de 10 M d’euros. Sur le fond, nous faisons confiance à la communauté éducative pour qu’elle puisse nous dire quels sont ses besoins. Si un établissement nous demande de la vidéo-protection à l’entrée du lycée, on en installe. S’il nous demande à l’intérieur de lycée pour protéger des espaces mal sécurisés, on le fait aussi.
L’objectif de 100 % de lycées connectés au THD est-il tenable en 2021 ?
Absolument ! A la fin de l’année 2017, 58% d’entre eux l’étaient déjà : l’objectif régional de 100% des lycées franciliens connectés à Internet THD d’ici à 2021 sera donc tenu. Nous avons autorisé dès 2016 le déploiement du WIFI dans les lycées et les premiers travaux d’installation ont démarré l’an dernier. Ils sont d’ailleurs notamment rendus possible grâce à l’action de la Région auprès de l’Union européenne, qui a permis de débloquer 7 M€ de fonds FEDER pour déployer le Wifi dans les lycées franciliens.
Où en est l’extension prévue du « budget autonome » à de nouveaux établissements ?
Ça avance très bien ! Face au succès rencontré par notre expérimentation de 2016, nous avons poursuivie celle-ci en 2017 : 12 nouveaux établissements ont ainsi été intégrés au dispositif en septembre dernier. Aujourd’hui, 24 lycées au total expérimentent ce budget d’autonomie. Celui-ci permet à chaque établissement d’être maître de ses projets concernant quatre volets spécifiques : innovation pédagogique pour la réussite des élèves, vie lycéenne pour améliorer la vie quotidienne, investissement pour les travaux du quotidien et ressources humaines. C’est une mesure qui illustre notre volonté de faire confiance aux équipes éducatives dans leurs besoins pédagogiques spécifiques. Fidèle à notre engagement, nous doublerons chaque année le nombre d’établissements bénéficiaires de ce budget d’autonomie.
L’introduction de produits bio dans les cantines progresse-t-elle ?
La consommation de produits bio se fait de plus en plus prégnante dans les établissements scolaires de notre Région. Nous consacrons cette année 1,2 millions d’euros à l’introduction des produits bio dans les cantines de 83 lycées, soit 20 % de plus qu’en 2016 ! Comment ça marche ? C’est simple : les établissements concernés s’engagent à utiliser prioritairement des produits biologiques régionaux et à mettre en place une démarche éducative d’accompagnement de l’opération. L’objectif est de proposer tout au long de l’année six produits ou familles de produits différents (pain, fruits, légumes, viandes, laitages, céréales…). Vous savez, j’ai pris l’engagement qu’à l’horizon 2024, 100 % de nos cantines soient approvisionnées par des produits locaux dont 50 % de produits bio ! Je n’attendrai d’ailleurs pas cette date pour mesurer les premiers progrès : je veux qu’on avance et vite, sans attendre que l’État affirme ses propres règles – du reste très floues – dans le projet de loi issu des États généraux de l’alimentation. L’appel à projets pour la production de légumes bio de plein champ que nous avons lancé va y contribuer.
Un mot sur le Plan Région bilingue et ses objectifs ?
Nous sommes une région mondiale, qui accueille 40 millions de touristes par an, où sont implantées de nombreuses multinationales… la maîtrise des langues est indispensable ! Il est malheureusement de notoriété publique que les chiffres de l’apprentissage des langues étrangères en Île-de-France sont médiocres. J’ai décidé de m’attaquer frontalement à ce problème avec notre plan pour une « Île-de-France multilingue d’ici 2022 » : d’une part en ciblant les lycées et d’autre part en sensibilisant l’ensemble de la population francilienne, via Internet. C’est pour cette dernière que nous lancerons à l’automne 2018 une application d’e-learning pour smartphone gratuite pour les utilisateurs, consacrée aux langues. Dans un premier temps, des cours, des exercices et des évaluations seront disponibles en anglais, en français langue étrangère, en allemand et en espagnol.
Cette appli proposera une approche pédagogique avec des contenus attractifs. Les utilisateurs pourront choisir, par exemple, de l’anglais des affaires ou conversationnel. Le programme, accessible en ligne, offrira aussi des modules spécifiques de rédaction de CV.
Pourquoi est-ce si important ?
Ce sujet des langues est vraiment crucial, surtout dans une région comme la nôtre qui compte 700 000 chômeurs et un taux de chômage des jeunes de 18 %. Un demandeur d’emploi, un salarié qui souhaite changer d’activité ou une femme qui veut retravailler après sa grossesse pourront trouver plus facilement un travail en apprenant les langues. Et puis, avec le Brexit, nous anticipons un véritable afflux d’investisseurs étranger à Paris dès 2019. L’environnement va devenir de plus en plus international.
En parallèle, nous sommes en train d’expérimenter des lycées 100 % numériques dans lesquels nous avons fait entrer des start-ups. Aujourd’hui, huit lycées franciliens sont concernés, fin 2018 il y en aura dix-sept ; nous doublons chaque année. Cela représente près de 20 000 lycéens. Nous leur offrons trois logiciels dédiés aux langues : English Attack, une méthode ludique d’apprentissage de l’anglais, basée sur des extraits de films, de séries télé et de jeux ; Speak Shake, qui permet à chaque lycéen d’échanger avec un élève dans un établissement jumelé (sept langues sont concernées) ; et enfin, Global Exam, qui sert à préparer en ligne les tests en cinq langues, comme le Toefl ou le Gmat, demandés, par exemple, dans des universités étrangères.
Les aides régionales aux exploitants agricoles semblent s’être améliorées : peut-on faire mieux ?
Les territoires ruraux où vit un Francilien sur six sont au cœur des priorités de la Région. Nous soutenons les filières bois et agricole, et luttons pour leur désenclavement. Par vous donner un exemple, afin de favoriser l’appropriation rapide des nouvelles technologies par les agriculteurs, nous avons signé une convention « Innovation » avec la Chambre régionale d’Agriculture. Un soutien qui poursuit trois objectifs : permettre la généralisation des technologies de rupture en matière de robotique, d’agronomie et de ciblage des intrants ; investir dans la capture et la collecte de données ; financer la création de nouveaux outils d’aide à la décision et leur diffusion au plus grand nombre. Un pacte agricole régional est aussi en cours d’élaboration. Il s’appuie sur plusieurs axes : le renforcement du soutien à l’installation et au démarrage des jeunes agriculteurs, le développement des circuits courts et la préservation des terres agricoles ou encore aide à la formation aux métiers de l’agriculture.
La valorisation de la proximité et le made in Île-de-France progressent-ils assez vite ?
Ça va dans le bon sens mais je veux aller encore plus vite. Après l’expérimentation des Pass Filières de nos prédécesseurs qui ont surtout permis de faire l’état des lieux, il est temps de passer à l’action en traitant chaque filière, l’une après l’autre, méthodiquement. Les « bergers d’Île-de-France » se sont lancés dans l’aventure et j’espère que la marque « Agneau d’Île-de-France », dont nous avons financé la création, se déclinera à toutes nos filières d’élevage d’Île-de-France car nous avons le devoir collectif de les sauver pour préserver cette diversité qui fait la richesse de notre économie et de nos paysages. En parallèle, nous faisons par exemple le pari ensemble avec les céréaliers, les coopératives, le négoce, les meuniers et les boulangers, de structurer la première filière de proximité francilienne, celle qui va du blé à la farine puis au pain, autour d’une identité Île-de-France traçable et reconnaissable. Et je fais la promesse que nos jeunes lycéens ne mangeront rapidement que du pain d’Île-de-France dans les cantines. Pour ce produit comme pour les autres, nous réunissons un groupe de travail avec la Chambre, nos services, les proviseurs et les intendants des lycées pour identifier les outils permettant de faciliter la relation entre producteurs et acheteurs des lycées.
Quels sont les grands lieux d’innovation du territoire ? Croyez-vous en leur développement et notamment au potentiel de certains secteurs comme l’intelligence artificielle (IA) et les transports intelligents ?
Ils sont nombreux et j’en suis particulièrement fière. A commencer par les incubateurs : il y en a plus d’une centaine entre Station F, Incuballiance à Saclay ou bien encore Starbust sur l’aéronautique. Nous soutenons aussi le projet Digihall à Saclay et l’additive Factory Hub, qui est un lieu d’innovation centré sur l’impression additive pour lequel nous avons mis 2,5 millions d’euros en 2017.
En ce qui concerne plus particulièrement l’intelligence artificielle, notre pays tient une place décisive dans la recherche dans ce domaine. Ce rayonnement s’appuie sur un écosystème francilien très riche et unique en France ! Nous comptons ainsi plus de 162 000 chercheurs en matière de mathématiques, IA ou médecine, qui concentrent 15 % de la recherche française sur le seul plateau de Saclay et plus de la moitié des entreprises et des équipes de recherche sur l’Intelligence Artificielle. C’est colossal ! Une politique nationale et européenne en faveur de l’IA ne saurait se construire sans la participation active de notre Région. Afin d’accélérer le développement de ce secteur stratégique pour l’Île-de-France, nous mettons en œuvre tous les moyens d’action pour en faire un territoire leader pour la France et l’Europe sur le sujet. On a d’ailleurs lancé un plan d’actions dédié sur l’intelligence artificielle dont des actions emblématiques peuvent être citées en cohérence avec le rapport de la mission Cédric Villani « Donner un sens à l’intelligence artificielle ». Enfin, nous croyons également beaucoup aux transports intelligents. C’est pour ça que nous avons soutenu le nouveau circuit d’homologation du véhicule autonome de Linas Monthélry, mais aussi des expérimentations de navette autonome et l’institut Vedecom, basé dans les Yvelines, qui travaille sur le véhicule autonome.