“La mobilité dans les territoires à faible densité de population est en train de devenir un enjeu majeur“, c’est le constat de la dernière note de la Fabrique écologique “Les territoires ruraux et périurbains, terres d’innovation pour la mobilité durable“. Le think tank pluraliste montre que la faiblesse de l’offre de mobilité dans ces territoires conjuguée à la raréfaction des services de la vie quotidienne conduisent à accentuer les exclusions sociales et à peser sur la transition énergétique.
Une coûteuse dépendance à la voiture
Ces territoires accueillent plus d’un Français sur trois, qui face à l’éloignement des services et des bassins d’emplois, sont sur-motorisés et très dépendants de l’automobile.
“Faisant face à des défis inédits tels que le vieillissement de la population ou l’inégalité d’accès à Internet et aux services numériques, ces territoires risquent de subir des phénomènes d’enclavement de plus en plus marqués“, remarque la Fabrique écologique.
La question de l’accessibilité aux services de la vie quotidienne est prépondérante dans les espaces peu denses. “Ainsi, si 46% des ménages situés dans les grandes unités urbaines déclarent ne pas avoir d’autre choix que la voiture pour aller au travail, ce chiffre bondit à 86% dans les communes rurales. Alors que la part du transport collectif s’est accrue dans les principaux pôles urbains, elle représente moins de 6 % des déplacements dans les autres territoires“, selon la note.
Ce constat a également d’autres conséquences. D’abord financière. En effet, les habitants des territoires peu denses dépensent en moyenne 17% de leur budget pour leur voiture, soit quatre fois plus que le poids budgétaire moyen d’un ménage français. Puis sociale, puisque « le taux de chômage est en moyenne cinq fois plus élevé chez les ménages modestes vivant hors des villes et n’ayant pas accès à la voiture ». Enfin, environnementale, du fait de déplacements accrus générateurs de gaz à effet de serre. Pour répondre à ces enjeux majeurs, la Fabrique écologique propose trois pistes concrètes pour une mobilité durable dans les territoires peu denses.
Donner sa place au vélo
Première piste : redonner une place au vélo. “Il s’agit de mettre en place une planification systématique de réseaux cyclables “malins”, sécurisés et efficaces en modérant les vitesses de circulation dans le périurbain et en aménageant les itinéraires dans les espaces ruraux“. En effet, le faible usage du vélo s’explique surtout par un déficit d’offre en infrastructures et services. Et de citer l’exemple du département du Pas-de-Calais qui a travaillé à sécuriser et faciliter l’accès à vélo des 126 collèges de son territoire. “Dans un périmètre de 3 km autour de chaque collège (périmètre légal d’obligation d’offre de transports scolaires), des parcours types sont identifiés avec les élèves et des aménagements simples sont préconisés pour les sécuriser. Cette démarche peut être réalisée pour un budget très réduit de 10.000 à 20.000 euros par collège, à l’aide de solutions de marquage au sol et d’aménagements modérateurs de vitesse bien situés. Elle a en outre le mérite d’offrir une solution efficiente de rationalisation du réseau de cars scolaires du département“.
Encourager la voiture partagée
Deuxième voie de réflexion : la voiture partagée. “C’est l’avenir de la mobilité durable dans les territoires peu denses, là où les moyens de transports collectifs traditionnels sont trop coûteux à mettre en place”, selon la note qui estime que c’est un marché d’avenir, à condition d’assouplir la réglementation du covoiturage quotidien et que l’autopartage fasse l’objet d’une véritable commande publique. Selon la Fabrique écologique, “le seul dispositif organisé qui ait fait ses preuves en France en matière de covoiturage dans les territoires peu denses, sous la forme d’un autostop organisé, est Rezo Pouce. En 2016, près de 1.000 communes françaises devraient avoir adhéré au dispositif“.
Coordonner et contractualiser
Enfin, pas d’issue sans nouvelle gouvernance. “Les collectivités des territoires peu denses doivent repenser les modalités d’application de leurs compétences et l’affectation de leurs budgets. Il s’agit notamment de recourir à des outils de coordination entre collectivités, de repenser les modes d’animation et de contractualisation territoriales avec les nouveaux acteurs des mobilités comme avec les acteurs de la vie courante (mairies, centres sociaux, associations, employeurs, garages, etc.), et de consacrer aux nouvelles solutions de mobilité une partie significative du budget transport disponible“, selon la Fabrique écologique. Et de lister les trois missions essentielles des Régions, Départements et intercommunalités, à leur échelle respective.
Il s’agit d’une part de “l’animation territoriale, sans frontières administratives, pour rassembler les acteurs et encourager les initiatives en se portant caution (tiers de confiance), voire en proposant une ingénierie de formation ou d’assistance à la conception, et le cas échéant en adaptant la réglementation“. D’autre part, la contractualisation. Il leur faut “compenser une partie des risques et des investissements et aider à organiser et articuler l’ensemble des solutions à disposition“.
Enfin, “la coordination, par la mise en commun de l’information et la simplification des parcours utilisateurs (information intégrée, billettique tous modes intégrée, communication intégrée, etc.), facilitée par l’ouverture des données“. Autant de responsabilités que les collectivités doivent prendre à bras-le-corps pour trouver enfin des solutions adaptées.