Le ministère de l’Environnement a lancé, le 18 avril, une consultation publique sur une série de textes réglementaires (deux décrets et un arrêté) précisant les modalités de mise à disposition des données relatives à l’énergie, par les gestionnaires de réseaux de gaz, d’électricité ou de chaleur, ainsi que par les opérateurs de produits pétroliers, à l’ensemble des personnes publiques, à commencer par les collectivités territoriales, dès lors que ces données sont utiles à l’accomplissement de leurs compétences. Pour rappel, ce dispositif d’information élargi résulte de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique (art. 179). Mais si ce texte législatif “marque une réelle progression pour la transmission des données de consommation d’énergie, c’est bien le décret d’application qui sera déterminant”, insiste l’ADCF (Assemblée des communautés de France), s’agissant en particulier de préciser la nature des informations, leur maille territoriale et le mécanisme de mise à disposition.
Retour d’expérience
A cet égard, la loi Grenelle 2 mise en œuvre par le décret du 16 novembre 2011 – relatif aux données permettant d’élaborer et d’évaluer les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie et les plans climat-énergie territoriaux – “prévoyait déjà la mise à disposition des collectivités territoriales compétentes des informations sur les réseaux et des données de production et de consommation de gaz et d’électricité à la maille communale, après masquage des données couvertes par le secret statistique ou commercial”, rappelle le ministère. Mais le retour d’expérience s’est révélé très décevant. La diffusion de données non homogènes et “très parcellaires” n’a pas permis aux collectivités territoriales d’établir des diagnostics précis sur leur territoire. Or, l’enjeu est de taille au regard des compétences que les collectivités doivent mettre en œuvre à des échelles multiples : schéma régional climat air énergie (SRCAE), plan climat air énergie territorial (PCAET), bilan d’émission de gaz à effet de serre (Beges), projet d’aménagement et de développement durable (Padd), etc.
Afin de peser en amont sur l’élaboration des projets de textes visant à pallier ces défauts, plusieurs associations de collectivités locales (Amorce, ADCF, Acuf, AMGVF et le Réseau des agences régionales de l’énergie et de l’environnement-Rare) ont établi en octobre dernier une contribution collective organisant la demande de données “en fonction des besoins liés aux actions de planification et du suivi air-énergie-climat, de distribution, production et maîtrise de l’énergie, d’aménagement des territoires et, enfin, de lutte contre la précarité énergétique”.
Maille du bâtiment
Un premier décret lève l’obstacle de la confidentialité sur les informations de production et consommation annuelles détenues par les gestionnaires des réseaux de gaz et d’électricité. Le second projet de texte précise les modalités de mise à disposition des données de transport, consommation et production d’électricité, de gaz naturel et de biogaz, de produits pétroliers et de chaleur et de froid ainsi que les personnes publiques bénéficiaires. Le texte définit précisément la nature des informations rendues publiques, de façon à limiter les atteintes potentielles au secret des affaires, au secret commercial ou statistique. A la maille du quartier, les données annuelles de consommation d’énergie pourront dorénavant être transmises aux collectivités par grand secteur d’activité sans masquage de données (leur sensibilité commerciale étant réduite). Le besoin de décliner les données au moins à la maille Iris (Ilot regroupé pour l’information statistique) plus fine que la maille communale faisait consensus.
De nombreuses demandes s’étaient toutefois exprimées afin d’accéder à un niveau encore plus fin (quartier, rue/îlot, immeuble, parcelle…) pour certaines données. Dans un objectif de rénovation énergétique et de lutte contre la précarité énergétique, les collectivités ont ainsi fait part de leur besoin d’avoir accès aux données par bâtiment. Les données relatives à des bâtiments comprenant moins de 10 consommateurs résidentiels ne leur seront cependant pas transmises sans l’accord de toutes les personnes concernées, dans un souci de protection des données à caractère personnel.
Gratuité de principe
Les données de production d’électricité seront quant à elles directement extraites du registre national, et publiées “installation par installation”, “sauf les petites installations domestiques qui seront regroupées pour éviter de diffuser des données à caractère personnel”, précise le ministère. Par ailleurs, notamment afin de permettre aux collectivités de rendre des comptes sur les politiques publiques ainsi que sur leurs effets concrets sur leur territoire, la grande majorité des données énergétiques visées seront diffusées sur internet. Point important : le principe de la gratuité est acté pour les missions normales d’accompagnement des services publics. “Seules les données à la demande, notamment les données fines sur la base de listes précises de bâtiments fournies par les collectivités seront facturées selon les tarifs des catalogues de prestation des opérateurs”, indique le ministère.
Enfin, le projet d’arrêté précise la décomposition des données par grand secteur d’activité (résidentiel, tertiaire, industriel, agricole) et aborde la question cruciale de la périodicité de transmission et de publication de ces données. Les données listées par bâtiment “étant susceptibles de comprendre des erreurs ou des imprécisions”, relève le ministère, “ne seront pas rendues publiques avant 2 ans au moins afin de s’assurer de leur qualité”.
Il est prévu de faire un bilan régulier de l’application du décret et “sur la possibilité de définir de nouvelles données mises à disposition”, à l’horizon 2018, “puis tous les 6 ans”.
Les observations du public seront recueillies jusqu’au 9 mai prochain.