En l’espèce, dans le cadre de l’aménagement d’une zone d’aménagement concerté (ZAC), une société d’économie mixte a acquis de la commune de Montreuil-sous-Bois la propriété d’un terrain ayant été le siège d’une installation classée. Suite aux études ayant mis en évidence une pollution par mercure du sol de ce terrain, le préfet de la Seine-Saint-Denis a mis en demeure ladite société au titre de la police des ICPE de procéder à la remise en état du site pollué du fait de l’exploitation des installations classées qui s’y étaient succédé pendant près d’un siècle. A la suite de l’annulation de cet arrêté préfectoral, la société qui avait immédiatement procédé à la dépollution du site a présenté une demande en indemnisation.En cassation, il appartenait ainsi au Conseil d’Etat de trancher sur la légalité de l’indemnisation accordée à cette société en réparation du préjudice allégué.
Pour le Conseil, il résulte des articles L.541-2 et L.542-3 du Code de l’environnement “que le détenteur de déchets de nature à porter atteinte à l’environnement a l’obligation d’en assurer l’élimination dans des conditions propres à éviter une telle atteinte”. Il incombait par conséquent à la société, qui pouvait être regardée comme détentrice des déchets en cause, d’assurer l’élimination des déchets et la remise en état du site au titre de la police des déchets. Le juge administratif fonde en effet sa décision non sur la police des ICPE mais sur l’article L.541-2 qui prévoit la responsabilité du détenteur et du producteur de déchets. Il confirme en cela la jurisprudence dite “Wattelez” (CE, 26 juillet 2011, n°328651, commune de Palais-sur-Vienne) par laquelle le Conseil avait considéré que “le propriétaire du terrain sur lequel ont été entreposés des déchets peut, en l’absence de détenteur connu de ces déchets, être regardé comme leur détenteur au sens de l’article L.541-2 du Code de l’environnement, notamment s’il a fait preuve de négligence à l’égard d’abandons sur le terrain”.
Obligation du maire
Toutefois, dans l’arrêt du 23 novembre dernier, “l’obligation du détenteur ne se limite pas à la question des déchets mais, plus généralement, lui impose de prendre toutes les mesures requises pour la remise en état du site lui-même”, souligne Arnaud Gossement, avocat spécialisé en droit de l’environnement. Le Conseil considère par ailleurs dans cette décision qu’il appartient au maire, au titre de la police des déchets, de prendre “les mesures nécessaires pour assurer l’élimination des déchets dont l’abandon, le dépôt ou le traitement présentent des dangers pour l’environnement”. En cas de carence de l’autorité municipale, le préfet doit se substituer au maire défaillant et imposer au détenteur des déchets l’élimination des déchets et la remise en état du site et ce sur le fondement de la police des déchets et non au titre de la police des ICPE. Pour Arnaud Gossement, cette interprétation a pour conséquence “de confier au maire l’obligation d’intervenir à l’endroit des sites relevant tout d’abord de la police des ICPE et donc du préfet”. Eu égard à cette lourde responsabilité, “nombre de maires se sentiront sans doute désarmés, notamment ceux de petites communes sans services spécialisés pour l’instruction de ce type de dossiers”, relève-t-il.
Cet arrêt fera l’objet d’un commentaire approfondi dans un prochain numéro de Droit de l’environnement