Ce nouveau plan réaffirme un objectif de diminution du recours aux produits phytosanitaires de 50%. Une réduction en deux temps : de 25% d’ici à 2020, puis 25% supplémentaires à l’horizon 2025. « Pour garantir sa compétitivité future, il faut que notre agriculture sorte de l’impasse constituée par une dépendance aux produits phytopharmaceutiques, car ils représentent une charge importante pour les agriculteurs et que l’évaluation de ces produits ne cessera de devenir plus exigeante, complexe et coûteuse », acte-t-il. Côté chiffres, ce plan rappelle que la France est au deuxième rang européen derrière l’Espagne pour la quantités de substances actives vendues, et au 9ème rang en termes d’utilisation (2,3 kg par hectare). Malgré l’engagement pris dès 2008 de réduire de moitié la consommation de pesticides en 2018, la France pulvérise donc toujours des doses records !
L’échec du premier plan
Cet échec est pudiquement souligné dans le second. Il est constaté que les résultats escomptés n’ont pas été atteints, qu’une légère augmentation du recours à ces produits est observée sur 2009-2011 et 2011-2013. Il reste de toute façon un sujet à discorde, entre ceux qui y voient un naufrage, et ceux qui l’estiment plus quantitatif que qualitatif. Aux yeux de Dominique Potier, interrogé en début d’année sur le sujet, il a sûrement péché par idéalisme, misant trop sur l’incitation au changement de pratiques et une vision technique, pas assez systémique. Il s’est de surcroît construit sur un consensus fragile.
Du retard a été pris dans l’agriculture, qui pèse sur 98 % des usages. Certes 400 000 professionnels ont suivi la formation Certiphyto. Mais au vu des derniers chiffres, on a l’impression, sans trop caricaturer, qu’une fois rentrés chez eux le certificat en poche, ils épandent de plus belle ! Surtout sur les grandes cultures, où 90 à 100 % des surfaces sont arrosées à l’herbicide dès le semis. Côté vigne, le retour au désherbage mécanique et à l’enherbement réduit la pression chimique, forte en Champagne et Beaujolais. La culture fruitière se montre vorace : les pommes reçoivent une trentaine de traitements par an, alors que les variétés plus résistantes, moins gourmandes en fongicides, existent mais seulement sur 3 % des surfaces plantées ! C’est donc tout un secteur qui peine à changer de modèle, se cramponne à l’intensif, ose peu la certification environnementale, voire l’agriculture bio qui a pourtant trouvé son marché.
Vaincre les conservatismes
Le besoin d’exercer différemment, de se réapproprier un métier, se fait néanmoins sentir dans les rangs des 300 000 exploitants. Ce second plan propose de prendre ce virage en faisant évoluer les pratiques et systèmes agricoles, en réorientant les efforts de recherche sur le biocontrôle, en misant sur l’innovation, en renforçant son appropriation localement par un soutien notamment des collectivités cherchant à approvisionner leurs cantines avec des produits locaux issus de l’agriculture biologique, etc. L’idée de gérer le plan par un délégué interministériel, glissée par Dominique Potier, n’a pas été reprise. Mais sa proposition, côté financement, visant à mieux mobiliser les moyens actuels – fraction de la redevance pour pollutions diffuses affectée à l’Onema inclus – pour soutenir des actions directement menées par les utilisateurs, plutôt que pour les organismes qui gravitent autour, l’est. Ces recettes supplémentaires cibleront « les investissements innovants, dans les exploitations agricoles et les groupements d’intérêt économique et environnemental » qui, d’avant-gardistes, sont devenus la coqueluche du ministère. Le plan acte enfin du lancement des certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques. Une ordonnance publiée le 8 octobre encadre leur expérimentation. Leur mise en place est prévue au 1er juillet 2016 en métropole.