À l’occasion des élections présidentielle et législatives, les candidats et les partis qui les soutiennent ont effectué de larges opérations de communication politique, s’appuyant notamment sur des fichiers de membres, de contacts réguliers ou encore de simples prospects. C’est pourquoi la CNIL a précisé, à l’approche des échéances électorales de 2012, et après consultation des principales formations politiques, les modalités d’application des principes de protection des données aux fichiers mis en oeuvre à des fins de communication politique. Une nouvelle recommandation a ainsi été adoptée, ainsi qu’un guide pratique à l’attention des partis politiques et des candidats.
Dans ce cadre, un ” Observatoire des élections 2012 ” a été mis en place. Il a assuré une veille, un dialogue avec les partis politiques et l’information régulière du public, notamment grâce à un site internet dédié comportant des informations à destination des électeurs et des partis politiques. Ce site proposait également d’adresser des ” témoignages ” à la CNIL.
Des améliorations doivent êtres apportées
Il ressort du bilan dressé par l’Observatoire, à l’issue des élections, que la protection des données personnelles des électeurs doit être sensiblement améliorée sur certains points, tout particulièrement en matière de communication électronique. La réception de messages électroniques non sollicités constitue en effet le motif principal des plaintes et témoignages reçus.
Les Français de l’étranger, dont les adresses électroniques figurent sur les listes électorales consulaires librement consultables par les partis politiques, ont ainsi adressé de nombreux témoignages à l’Observatoire, par exemple : ” Je suis sans arrêt spammé par de multiples partis politiques. Je n’ai pas donné mon accord au Consulat français de [X] pour communiquer mon email personnel aux partis.” Des réactions souvent amplifiées par la fréquence importante de certains messages : ” Cela fait 5 fois que je suis contacté par l’équipe de [X], suite à la récupération de mon email sur le site consulaire. C’est inadmissible, cet email est important et est à présent pollué par ces spams.”
Les électeurs résidant en France se sont également plaints de la réception de courriels non sollicités – les adresses électroniques étant alors obtenues par la location de bases de données commerciales. D’autre part, les difficultés à se désinscrire de telles listes de diffusion ont également été à l’origine de plaintes.
Pour la CNIL, ” La plupart des difficultés rencontrées par les électeurs dans le cadre de la campagne pour l’élection présidentielle auraient été évitées si les candidats et partis politiques avaient davantage respecté les dispositions de la loi “Informatique et Libertés” et les recommandations de la CNIL.”
Des propositions concrètes de la CNIL
Les problèmes identifiés par l’Observatoire durant ces campagnes électorales montrent la nécessité de mieux encadrer la prospection politique, tout particulièrement en matière de communication électronique. La Commission a donc adressé au Gouvernement des propositions de modification du cadre juridique actuel.
En particulier, il apparaît nécessaire d’aligner la protection dont bénéficient les électeurs sur celle accordée aux consommateurs en matière de prospection électronique. C’est pourquoi la CNIL propose que les messages électroniques de prospection politique ne soient adressés qu’aux personnes ayant préalablement consenti à cette utilisation de leurs données, tout comme cela est le cas en matière de prospection commerciale.
Elle propose également que des dispositions spécifiques concernant la prospection par voie électronique en période de campagne officielle soient intégrées au Code électoral. Les témoignages adressés à la Commission montrent en effet que la fréquence d’envoi des messages de prospection (courriers électroniques principalement, mais également SMS ou MMS), les modalités de constitution et d’utilisation des listes électorales consulaires, l’information des Français de l’étranger sur les possibilités d’utilisation de ces listes, les modalités et délais de traitement des demandes d’opposition des personnes à recevoir des messages ultérieurs, les mentions d’information minimales à faire figurer dans chaque message de prospection politique adressé durant cette période, devraient être précisés dans des dispositions réglementaires figurant au Code électoral.
Vers la signature d’une Charte ?
L’amélioration de la protection des données traitées par les partis politiques et les candidats passe enfin, nécessairement, par un ” travail de collaboration et de sensibilisation de ces acteurs à cette problématique “, insiste la CNIL.
Après avoir consulté les principaux partis politiques avant l’adoption de sa recommandation de janvier 2012 et leur avoir rappelé, entre l’élection présidentielle et les élections législatives, les recommandations principales de la Commission en matière de prospection politique, la CNIL va leur présenter ce bilan des campagnes électorales du point de vue de la protection des données personnelles.
Des réunions seront organisées avec les principales formations politiques afin de les sensibiliser sur ces questions, de plaider pour la désignation de correspondant ” Informatique et Libertés ” en leur sein et de leur proposer la signature d’une charte relative à l’utilisation des données personnelles aux fins de communication politique.
De même, la concertation sera poursuivie avec les principales entreprises du secteur (prestataires réalisant les campagnes de prospection, entreprises louant leurs bases de données aux partis politiques), afin de mieux leur faire connaître les recommandations de la CNIL en la matière.