Interdiction de l’exploration d’hydrocarbures : le projet de loi dévoilé par Nicolas Hulot

Arrêter la recherche d’hydrocarbures, telle est la priorité essentielle affichée par le projet de loi présenté par Nicolas Hulot lors du conseil des ministres ce 6 septembre. Repoussant à une échéance plus lointaine la refonte du code minier, cette première étape pourrait toutefois être accompagnée d’une réforme de la fiscalité sur l'exploration (aujourd’hui non taxée) et l'exploitation des hydrocarbures au bénéfice des communes. 

 

 

Le projet de loi mettant fin à la recherche et à l’exploitation des hydrocarbures, annoncé par le candidat Macron dans son projet présidentiel, a été présenté en conseil des ministres par le ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, ce 6 septembre. Ce texte – qui fera l’objet d’un examen accéléré dés la fin du mois pour assurer son adoption “d’ici la fin de l’année” – constitue la première brique du Plan climat détaillé par le ministre le 6 juillet dernier. En renonçant à l’exploitation des hydrocarbures sur son territoire,y compris outre-mer, la France espère en se plaçant dans les “wagons de tête” entraîner d’autres pays dans son sillage dans la continuité de l’Accord de Paris qui vise la neutralité carbone à horizon 2050. Avec une production marginale de 0,8 million de tonnes d’hydrocarbures concentrée dans les bassins parisien et aquitain, la production nationale représente seulement 1% de la consommation nationale.

 

Enterrement des gaz de schiste

Dès la publication de la loi, plus aucun nouveau permis de recherche d’hydrocarbures non conventionnels (comme le gaz ou l’huile de schiste, les sables bitumineux, les hydrates de méthane…) ne sera attribué, et ce “par quelque technique que ce soit”. Le recours à la fracturation hydraulique était déjà interdit par la loi du 13 juillet 2011. Mais en l’état actuel de la législation, le développement de méthodes alternatives laissait la porte ouverte à la recherche de nouveaux gisements. Ainsi, “à partir du moment où est interdite la recherche d’hydrocarbures, et où aucun permis d’exploration de gaz de schiste n’a été délivré à ce jour, aucune exploitation de gaz de schiste ne sera plus possible en France”, explique Xavier Ploquin, conseiller énergie, industrie et innovation de Nicolas Hulot. Le texte abroge au passage les articles de la loi concernant la Commission nationale d’orientation, de suivi et d’évaluation des techniques d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux, en réalité jamais réunie.

Le projet de loi amorce par ailleurs la sortie progressive de la production d’hydrocarbures conventionnels à l’horizon 2040. Concrètement, les 63 concessions d’exploitation existantes ne pourront pas être renouvelées au-delà de cette date butoir déterminée “en cohérence avec la durée moyenne des concessions de l’ordre de 25 ans”. La fin de la production d’hydrocarbures à l’horizon 2040 est également convergente avec d’autres mesures du Plan climat, comme la fin de la vente des voitures essence ou diesel. “Ce projet de loi n’est pas l’alpha et l’oméga, c’est un élément important qui doit être assorti de deux autres priorités présentées dans le Plan Climat et que je vais développer dans la programmation pluriannuelle de l’énergie : la réduction de notre consommation – avec un objectif de réduction de 50% d’ici 2050 – et le développement des énergies renouvelables”, reconnaît le ministre.

 

Quid des gaz de houille ?

Le gouvernement va donc pouvoir refuser plus de 40 demandes de permis déposées avant le projet de loi, tout en assurant “le droit de suite”, c’est-à-dire la transformation en concession des titres acquis – au nombre de 31 -, évitant ainsi “les risques contentieux”. C’est notamment le cas en Guyane française du permis de recherche en cours de validité (“Guyane Maritime”). En revanche, deux autres permis également au large de la Guyane en cours d’instruction ne seront pas octroyés (“permis UDO” situé sur le domaine maritime profond et “SHELF” situé sur le plateau continental guyanais), selon le cabinet de Nicolas Hulot.

Le gaz de mine – plus connu sous le nom de “grisou” – accumulé dans d’anciennes mines de charbon n’est pas concerné par ce projet de loi : “il est utile pour l’environnement et les risques à le maintenir dans les galeries minières sont très élevés”, justifie le ministère. La question du gaz de houille piégé dans les couches de charbon et qui nécessite des techniques plus invasives demeure plus incertaine malgré les éclaircissements apportés en conférence de presse par Xavier Ploquin. Les forages réalisés en Lorraine depuis 2004 – par la Française de l’Energie – ont en effet éveillé de fortes oppositions locales relayées par “l’APEL57”. Selon le conseiller, “les gaz de houille sont touchés par la même interdiction de délivrance de nouveaux permis de recherche”. En clair, les permis déjà validés ne seront pas remis en cause. Les méthodes employées pour l’extraction ne font pas appel à la fracturation hydraulique, mais à des “techniques conventionnelles”, souhaite néanmoins rassurer le ministère.

 

Vers une réforme de la fiscalité minière

La première priorité du projet de loi qui se veut “court et simple”, relève Xavier Ploquin, est donc d’arrêter la recherche d’hydrocarbures. Cette première étape devra être complétée ultérieurement par une refonte plus profonde du code minier “afin notamment de traiter la question des mines non énergétiques et de l’après-mine”. Le gouvernement se laisse le quinquennat pour traiter ce chantier en gestation depuis 2011. A plus brève échéance, le ministère prévoit une réforme de la fiscalité portant sur l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures “afin d’actualiser les montants inchangés depuis longtemps et de mettre en place une nouvelle fiscalité sur l’exploration (aujourd’hui non taxée) au bénéfice des communes”.
Le projet de loi comprend enfin une habilitation à réglementer par ordonnance le système d’infrastructures souterraines de stockage de gaz naturel “permettant de mieux garantir la disponibilité du gaz en hiver”. Un dernier volet assure la transposition de directives européennes en particulier la directive 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphérique.

Laisser un commentaire