Cette décision d’annulation partielle rendue ce 6 décembre, suite à une nouvelle action de France nature environnement (FNE), contraint le gouvernement à revoir à nouveau sa copie sur l’organisation des autorités environnementales. En cause, la double casquette du préfet : autorité identique pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d’ouvrage et pour rendre un avis sur l’évaluation environnementale.
Précédents jurisprudentiels
Dans un arrêt en date du 3 novembre 2016 (n°360212, Association FNE), le Conseil d’Etat avait déjà épinglé cette confusion des genres à travers le décret du 2 mai 2012 relatif à l’évaluation de certains plans et documents ayant une incidence sur l’environnement. Tirant les conséquences de l’arrêt Seaport de la Cour de justice de l’Union européenne (C/474-10) et de la jurisprudence du Conseil d’Etat, imposant, non une séparation organique mais fonctionnelle de nature à assurer l’indépendance effective de l’autorité environnementale, le décret du 28 avril 2016 a notamment créé les missions régionales d’autorité environnementale du CGEDD – Conseil général de l’environnement et du développement durable – (MRAe).
Ce faisant, il a principalement transféré la compétence d’autorité environnementale, lorsqu’elle était antérieurement confiée aux préfets de région ou de département, à la formation d’autorité environnementale (Ae) du CGEDD ou aux MRAe selon la nature des plans et programmes. Ces missions régionales sont également compétentes pour émettre des avis sur la plupart des documents d’urbanisme et plus marginalement sur certains projets – ne relevant ni du ministre de l’Environnement ni de l’Ae – qui continuent toutefois à être instruits par les services déconcentrés de l’Etat.
La Haute Juridiction n’a en revanche pas suivi les autres moyens développés par FNE au soutien de son recours. Le Conseil d’Etat estime en particulier que bien que s’appuyant, pour l’instruction des demandes d’avis, sur un service régional constitué au sein de la Dreal, qui exerce ses missions sous l’autorité du préfet de région, la MRAe “doit être regardée (…) comme disposant d’une autonomie réelle, la mettant en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur les projets, plans et programmes qui lui sont soumis”. Placé sous l’autorité fonctionnelle du président de la mission régionale, ce service spécialement désigné doit, selon les dispositions attaquées, “disposer de moyens humains et administratifs dédiés à cette mission”, souligne l’arrêt.
Un modèle à revoir
Le système des autorités environnementales a été repensé pour les plans et programmes. Mais “un modèle présentant au moins les mêmes garanties pour tous les projets reste à concevoir”, selon l’Ae elle-même. La répartition des compétences entre autorités environnementales sur les études d’impact de projet est restée globalement inchangée. Le feuilleton pourrait donc se poursuivre y compris devant les tribunaux. Dans son dernier rapport annuel, l’Ae estime “qu’une évolution vers des autorités réellement indépendantes des autorités décisionnelles est désormais inéluctable, tout particulièrement à la lumière des motifs qui ont conduit aux réformes actées en 2016”.
Pour Michel Dubromel, président de la fédération FNE, à l’origine des deux arrêts successifs du Conseil d’Etat, la future organisation des autorités environnementales “doit être plus simple et ne pas ouvrir la voie à de nombreuses exceptions. Elle doit également asseoir la légitimité de ces structures, veiller à garantir la clarté et la solidité de ces avis et décisions, pour éviter l’écueil de la suspicion”. Pour un plan ou projet local, FNE propose “que le travail d’analyse de l’étude d’impact, de discussion avec les maîtres d’ouvrage et de rédaction des avis soit assuré par les agents compétents hiérarchiquement rattachés à des missions régionales d’autorité environnementale, sans que le représentant local de l’Etat – préfet de région et préfet de département – ne puisse intervenir dans leur déroulement de carrière”.