Éolien en mer : un cadre juridique rénové mais des objectifs en berne

Alors qu’il faut actuellement compter une dizaine d’années entre l’appel d’offres et l’exploitation d’un parc éolien offshore, la parution du décret portant simplification des procédures applicables aux énergies renouvelables en mer apparaît comme une promesse d’accélération pour les porteurs de projet. Un texte qui tranche toutefois avec la réalité des annonces du ministre de la Transition écologique, François de Rugy, au moment où se dessine la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE). 

Le décret réformant le cadre juridique applicable aux énergies renouvelables en mer, déclinaison réglementaire de l’article 58 de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance (Essoc, voir le dossier législatif du Sénat sur ce texte), est paru au Journal officiel ce 23 décembre. Une publication très attendue par les acteurs de la filière qui vient contraster avec les annonces décevantes du gouvernement concernant le développement de l’éolien offshore pour les prochaines années, avec dans le meilleur des cas 5 GW en service en 2028, tandis que professionnels et territoires en proposaient 10. 

Débat public en amont

Un texte pourtant destiné à accélérer le processus décisionnel tout en favorisant une meilleure acceptabilité des projets, grâce à un débat public organisé une seule fois par la Commission nationale du débat public (CNDP), en amont de toute procédure de mise en concurrence. 
L’objectif est d’améliorer la prise en compte de l’avis du public “au plus tôt”, insiste le ministère, notamment pour recueillir ses observations sur l’emplacement du parc. Le lauréat de l’appel d’offres étant par la suite dispensé de saisir la CNDP. 

Cette phase de participation du public sera conduite sous la houlette de l’État, en associant le cas échéant  “le conseil régional territorialement intéressé”.  La collaboration de l’assemblée délibérante régionale “à la procédure et à l’élaboration du dossier soumis à débat ou à concertation” reste cependant à la discrétion du ministre. Le maître d’ouvrage des ouvrages de raccordement aux réseaux publics d’électricité d’installations de production d’énergie renouvelable en mer y est, en revanche, systématiquement associé. 

De l’art de souffler le chaud et le froid

Mais c’est avant tout sur la création d’un “permis enveloppe”, regroupant les diverses autorisations requises – autorisation environnementale, concession d’utilisation du domaine public maritime et autorisation d’exploiter -, que repose l’effort de simplification poursuivi. Celui-ci permettra la délivrance d’autorisations pouvant évoluer pour intégrer des caractéristiques variables – y compris sur des éléments décisifs comme le nombre d’éoliennes ou encore la puissance unitaire de la turbine -, sans avoir besoin de recourir à des actes modificatifs. 
Ne pourront bénéficier de cette flexibilité encadrée que les projets pour lesquels aucune demande d’autorisation n’a été déposée, et ce “jusqu’à six mois” après la publication de la loi Essoc du 10 août 2018. Peu de projets sont dans les tuyaux. Pour l’éolien en mer posé, seuls le projet de Dunkerque et un autre appel d’offres en Manche sont prévus d’ici à 2020. 

Pour plusieurs régions, dont la Bretagne, la Normandie, l’Occitanie et la Nouvelle-Aquitaine, les déclarations de François de Rugy, à Brest, lors des Assises nationales de l’économie de la mer en novembre dernier, en marge de la présentation de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), ont résonné comme un “coup de tonnerre”. Avec des objectifs réduits de moitié par rapport aux recommandations du secteur, “la France choisit le scénario catastrophe” pour le développement de cette filière industrielle et des  emplois qui y sont attachés, ce malgré le fort investissement des régions littorales, déplorent-elles dans un communiqué commun aux représentants professionnels.   

PML

Photo : un champ éoliennes flottantes, crédit Alstom-DCNS

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