Il y a eu des avancées, mais insuffisantes. La Fabrique écologique dresse un bilan nuancé du quinquennat Hollande en termes de décentralisation énergétique. Dans une nouvelle note, elle formule des propositions pour faire enfin basculer le système électrique français vers un modèle décentralisé “proche des citoyens“.
Pendant le quinquennat, plusieurs textes ont fait évoluer la législation sur ce sujet : la loi de transition énergétique, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (Maptam), ou encore la loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe). “Incontestablement, un certain nombre de collectivités locales ont pris en main le sujet de l’énergie de façon plus active“, observe Géraud Guibert, président de la Fabrique écologique et président du groupe de travail sur cette note. “Par contre, la logique d’ensemble de la gouvernance énergétique française n’a pas été modifiée en profondeur. “
Une totale responsabilité
Le think tank relève deux écueils. D’abord, une planification régionale totalement déconnectée de la planification nationale. Ensuite, des moyens financiers et humains concentrés au niveau des grands opérateurs d’État. “Nous proposons donc une nouvelle étape de la décentralisation énergétique“, expose Géraud Guibert. Pour cela, la Fabrique écologique formule deux propositions principales. Elles concernent le système électrique français.
La première proposition s’inscrit dans le prolongement d’une précédente note parue en 2014. Il s’agit de confier aux Régions l’intégralité des responsabilités sur le développement des énergies renouvelables décentralisées. C’est-à-dire la plupart des énergies renouvelables, à l’exception par exemple de l’éolien en mer. Les Régions auraient la responsabilité d’organiser les compétences sur leur territoire en matière d’énergie. Elles fixeraient les règles et délégueraient ensuite les opérations, selon les cas, aux métropoles, aux départements, aux syndicats d’énergie communaux ou intercommunaux. Sur le plan incitatif, les Régions disposeraient d’un nouveau levier financier. Ce dispositif serait d’abord expérimenté. Il s’agit d’instaurer un supplément régional au mécanisme de soutien à la production d’électricité renouvelable, que ce soit le tarif d’achat ou le complément de rémunération. Pour le financer, les Régions pourraient aussi appliquer un supplément régional à la contribution au service public de l’électricité, payée par le consommateur final. Cette proposition était l’une des 14 idées présentées le 16 février aux candidats à l’élection présidentielle.
Doubler le taux d’autoproduction
La Fabrique écologique propose aussi de rendre les Régions responsables financièrement de l’adaptation des réseaux à la montée en puissance des énergies renouvelables décentralisées. L’opérateur national Enedis serait “totalement responsable” du socle d’investissement nécessaire pour le réseau existant. L’articulation entre les deux s’opérerait via une convention sur le modèle de ce qui se fait avec la SNCF pour les TER.
Deuxième axe de ses propositions : l’autoproduction. La Fabrique écologique salue les récentes évolutions réglementaires sur l’autoconsommation. “Mais il manque un objectif politique mobilisateur“, estime Géraud Guibert. Plutôt que l’autoconsommation, le think tank préfère se focaliser sur l’autoproduction, afin d’éviter des effets pervers. Le taux d’autoconsommation est la part d’électricité produite qui est consommée sur place. Le risque est de limiter la taille des installations de production pour augmenter mécaniquement ce taux.
Et l’État s’adaptera
Par contre, le taux d’autoproduction est la part d’électricité consommée qui a été produite sur place. La Fabrique écologique propose de fixer un objectif : doubler la part de l’autoproduction d’électricité dans la consommation totale d’électricité en France d’ici à 2022 par rapport à 2014. Cette part atteindrait alors 8%, c’est-à-dire la part de l’autoproduction en Allemagne en 2014. En complément, l’idée serait de fixer durablement – sur cinq ans – les paramètres économiques : prime à l’autoproduction, tarif d’utilisation du réseau électrique, etc.
En suivant cette logique, les Régions prendraient la main sur le développement des énergies renouvelables décentralisées. Charge à l’État d’adapter la planification concernant les autres moyens de production d’électricité.