Quel point commun entre un recensement des terrasses autorisées à Toulouse, la liste des réunions de l’Assemblée nationale ou les horaires des transports en commun de l’agglomération lyonnaise ? Réponse : ce sont des données ouvertes, accessibles en ligne et utilisables par tous. Le concept d’open data envahit doucement le paysage institutionnel français. Montpellier, Paris, Grenoble, Nice ou Issy-les-Moulineaux, ce sont surtout des collectivités d’une certaine taille qui se sont lancées dans des expérimentations grandeur nature. Mais tout le monde va devoir s’y mettre : la loi Notre oblige ainsi toutes les communes de plus de 3500 habitants à ouvrir leurs données. La loi Macron prévoit, elle, la libération « dans un format ouvert » des données de transports détenues par les opérateurs (arrêts, tarifs, horaires théoriques et en temps réel…) tandis que celle sur le numérique s’attaque à toutes les « données publiques communicables » notamment celles qui concernent l’environnement et l’énergie.
« L’open data a trois objectifs : assurer la transparence de l’action publique en permettant l’affichage en temps réel d’indicateurs, de pollution par exemple, faciliter la création de services nouveaux et autres « applis » potentiellement révolutionnaires en laissant entrepreneurs, universitaires ou amateurs éclairés travailler sur les données, et, faciliter la gestion de ces données dans les collectivités et les échanges entre services qui fonctionnent encore trop souvent en silo », énumère Jean-Marie Bourgogne, ancien directeur de Montpellier Numérique et délégué général de l’association Open Data France, qui propose de prêter main forte aux collectivités sur le sujet.
Elus motivés, animateur à temps-plein
Format, sécurité, hébergement, etc. sont des sujets à prendre en compte, mais, insiste Jean-Marie Bourgogne, « l’open data n’est pas un projet technique. Il doit être porté par un élu motivé et animé par au moins un agent à temps-plein, voire deux dans les grandes collectivités. Si les données sont publiées sans animation, aucune chance que quelqu’un s’en saisisse ! » « Nous sommes cependant face à des métiers nouveaux. Il existe un fort besoin de formation », remarque Paul Sitbon, président de Sikiwis et fondateur du congrès Smart countries & cities (S3C) Paris.
Besoin de nouvelles compétences, certes, mais surtout d’échanges entre les élus et entre les différents services. « La ville durable a toujours eu besoin de transversalité. Le numérique oblige encore un peu plus à échanger », observe Michèle Pappalardo, coordinatrice de Vivapolis, la marque de la « ville durable » à la française. C’est le cas à la mairie de Grenoble où une délégation à l’« open data et aux logiciels libres » a été créée. Un important travail d’évangélisation est à mener dans les services. « Je dois expliquer qu’une telle politique n’entraîne pas de pertes de données, mais permet au contraire de les enrichir. Désormais, nous pouvons ainsi proposer, via la technologie sans contact NFC, les horaires en temps réel des bus urbains de la Semitag en même temps que ceux des cars interurbains de Transisère », illustre Frédérick Petit, à la fois responsable des systèmes d’information mobilité et déplacement au Syndicat mixte des transports en commun (SMTC) de Grenoble et responsable Open data à Grenoble-Alpes Métropole.
Se concentrer sur quelques jeux de données
Open Data France propose sur son site plusieurs guides thématiques ou généraux sur l’open data. Dans une plaquette intitulée « Les 10 points essentiels pour ouvrir ses données », la jeune pousse OpenDataSoft délivre quelques sages conseils : se concentrer sur seulement quelques jeux de données afin d’obtenir des retours rapides et de pouvoir prêcher la bonne parole en interne, choisir un thème simple avec des données faciles à structurer (pourquoi pas la localisation des arceaux vélos et/ou des arrêts de métro et de bus…?), un format ouvert et une licence fréquemment utilisée (licence ouverte Etalab, Open database licence…), et, enfin, même si un site national gratuit existe, créer un portail Open Data spécifique à l’image par exemple de celui de la communauté d’agglomération Grand Paris Seine Ouest qui rassemble les données de huit communes. « C’est un sujet neuf. Il faut procéder par étape, ne pas avoir peur d’expérimenter, de mettre en place une première brique avant de progresser », synthétise Jean-Marie Bourgogne.
« Parlez de vos données », conseille enfin la brochure. Rien de mieux pour cela qu’un hackathon, ou marathon de programmation informatique collaborative à partir de jeux de données. Ceux-ci se multiplient. Le Grand Nancy et Engie en organisaient ainsi un en novembre sur la transition énergétique dans la ville, le ministère de l’Environnement en prévoit très prochainement sur le thème de la biodiversité… A Grenoble, c’est un « infolab » qui vient d’ouvrir, lieu d’accueil qui propose régulièrement des sessions thématiques d’information et de travail autour de l’open data à un public encore souvent averti.