Bretagne, tourisme et algues vertes : une équation pas définitivement perdante

 

Une étude du CGEDD veut évaluer les coûts indirects de la prolifération des algues vertes sur le littoral breton. Et tente d'établir un lien entre marées vertes et fréquentation touristique.

 


Les échouages d’algues vertes génèrent des risques pour la santé humaine et animale, nécessitent de mettre en place un ramassage et un traitement coûteux, nuisent aux activités économiques et de loisir sur la frange littorale, et notamment à la conchyliculture et au tourisme. En revanche, aucune étude ne s’est penchée sur les coûts indirects, en particulier sur le tourisme. C’est ce que tente de faire, avec beaucoup de précautions, le CGEDD qui a voulu savoir si le phénomène des marées vertes a réduit la fréquentation touristique locale des régions touchées et selon quelle ampleur. Une tentative qui contribue à l’analyse économique et sociale du coût de la dégradation des milieux littoraux et marins par les activités humaines demandée par la directive-cadre stratégie pour le milieu marin. Cette analyse n’avait pu être réalisée jusqu’ici faute de données, ni en France, ni dans d’autres pays. L’étude du CGEDD s’appuie sur un rapprochement inédit entre des données économiques locales et des données environnementales :  données de surfaces d‘échouage d’algues vertes (source CEVA), des données économiques sur la fréquentation touristique (source Insee) et des données climatiques (source météo France). 


Un impact local relativement faible

L’étude montre une baisse du taux de fréquentation touristique de l’ordre de cinq points en moyenne sur l’ensemble des communes du littoral du grand Ouest entre 2006 et 2009. Cette forte baisse coïncide avec une prolifération des algues. Mais une analyse plus poussée sur l’impact local montre un impact relativement faible sur la fréquentation des hôtels, et pas d’impact sur celle des campings. En revanche, il est observé un impact des algues plus prononcé pour les sites localisés au sud du littoral breton et au Pays de la Loire, où le tourisme est davantage tourné vers la baignade. Cependant les chercheurs pointent les limites de l’exercice. En effet, de nombreux autres facteurs peuvent aussi expliquer la baisse de fréquentation de la région entre 2006 et 2009 tels que les mauvaises conditions météo, la crise économique ou le mauvais positionnement en gamme des hébergements. C’est pourquoi, ils préconisent de nouvelles recherches.


Entamer de nouvelles recherches

Il s’agirait d’abord de conforter les résultats notamment par des données plus précises : données météo mais aussi d’autres indicateurs de milieu traduisant une pollution pénalisante pour le tourisme comme la qualité bactériologique des eaux de baignade. Il faudrait aussi tester d’autres familles de modèles susceptibles de prendre en compte la dimension spatiale des phénomènes. Il serait également utile d’agrandir l’échantillon pour gagner en précision et tenir compte d’éventuels effets régionaux. Enfin, pourquoi ne pas mesurer l’impact des algues sur d’autres dimensions économiques. En effet, les impacts de la pollution aux algues vertes peuvent notamment s’apprécier en termes d’emplois dans les activités liées au tourisme, de fréquentation des résidences secondaires ou sur les prix de l’immobilier du littoral.



La piste de la revalorisation

Les algues vertes peuvent dans certains cas être valorisées économiquement. Ainsi, l’utilisation d’algues vertes comme compost progresse. De nombreux chercheurs tentent également de valoriser tout ou partie des algues vertes à des fins énergétiques (méthanisation des algues pour produire du biogaz et éventuellement de l’électricité, bioéthanol), chimiques (fabrication des matériaux, par exemple du papier-carton), nutritifs (alimentation des animaux d’élevage, compléments alimentaires pour les poissons herbivores) ou cosmétologiques (grâce aux propriétés texturantes et chimiques de certaines algues vertes). Si les projets de valorisation des algues sont prometteurs, la plupart relèvent encore du domaine de la recherche et les débouchés ne sont pas certains.

Laisser un commentaire