Au 31 mars 2018, le taux d’application des 24 lois promulguées au cours de l’année parlementaire 2016‑2017 et examinées au fond par la commission des lois, c’est-à-dire le ratio entre le nombre de mesures d’application attendues et le nombre de mesures prises, s’est élevé à 7 %, soit un taux identique à celui de l’année passée.
Toutefois, le président Philippe Bas (Les Républicains-Manche) a souligné que « les délais dans lesquels ces mesures sont publiées sont parfois plus longs que les délais d’adoption des lois elles‑mêmes ». Presque un tiers des mesures prises pour l’application des lois promulguées au cours de l’année parlementaire 2016-2017 l’ont été plus de six mois après la promulgation de la loi. Pour Philippe Bas : « Ce taux élevé témoigne de l’inanité de vouloir à tout prix accélérer la navette parlementaire, au détriment du droit d’amendement et de la qualité de la loi, si le Gouvernement n’est pas en mesure de prendre dans des délais raisonnables les textes réglementaires nécessaires. »
Encore trop de textes…
L’inflation législative, mal bien connu et régulièrement dénoncé, est restée forte. Plusieurs textes examinés au fond par la commission des lois y ont été confrontés. L’exemple le plus criant est celui de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dont le nombre d’articles est passé de 15 dans le projet de loi initial à 148 dans le texte final, soit un coefficient multiplicateur du nombre d’articles au cours de la navette parlementaire de 9,9. Pour Philippe Bas : « Chacun porte sa part de responsabilité dans ce phénomène. Celle du Gouvernement est grande. Ainsi, la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle est passée de 54 à 115 articles, du fait notamment de l’insertion par l’Assemblée nationale de 55 articles additionnels en première lecture, dont les deux tiers à l’initiative du Gouvernement. »
… mais des manques
Analysant plus en détail la mise en œuvre des lois promulguées au cours de l’année parlementaire 2016‑2017, le président Philippe Bas a notamment regretté l’absence de publication de deux mesures d’application de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique, l’une pour permettre à toute personne de définir des directives relatives à la conservation, à l’effacement et à la communication de ses données à caractère personnel après son décès (“mort numérique”), l’autre pour fixer la liste des pièces justificatives que les personnes n’ont plus à produire lorsqu’une administration détient déjà ces informations (mise en œuvre du principe “dites-le nous une fois”).
Enfin, il a observé que l’ordonnance tendant à créer une « banque de la démocratie », prévue par la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, ne serait probablement pas publiée dans le délai d’habilitation prévu par la loi, soit avant le 15 juin 2018, en raison des difficultés que le Sénat avait soulevées lors de l’examen de ce texte au regard de la neutralité que l’État doit respecter en matière de compétition électorale.
© Richard Ying et Tangui Morlier