Quatre : c’est le nombre de grands changements que le Premier ministre propose de mettre en œuvre dans l’univers parfois conservateur des collectivités. Le premier d’entre eux concerne la réduction de moitié le nombre de régions. Les régions pourront proposer de fusionner par délibérations concordantes. En l’absence de propositions, après les élections départementales et régionales de mars 2015, le Gouvernement proposera par la loi une nouvelle carte des régions. Elle sera établie pour le 1er janvier 2017.
Le deuxième a pour objet la création d’une nouvelle carte intercommunale, fondée sur les bassins de vie entrera en vigueur au 1er janvier 2018.
Le troisième vise une clarification des compétences. Le Premier ministre proposera, en effet, la suppression de la clause de compétence générale. Ainsi, les compétences des régions et des départements seront spécifiques et exclusives. Pour mémoire, rappelons que la clause générale de compétence indique qu’il est accordé aux collectivités une capacité d’intervention générale, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une énumération de leurs attributions. Elle repose sur les “affaires de la collectivité” ou l’intérêt public local. Elle découle de la loi municipale de 1884 et a été étendue en 1982 aux autres collectivités territoriales.
Enfin, Manuel Valls a annoncé qu’il allait engager le débat sur l’avenir des conseils départementaux et propose leur suppression à l’horizon 2021.
15 à 20 milliards d’économies à terme
Interrogé sur Europe 1 au lendemain de ces annonces, René Dosière, député PS connu pour son franc-parler par forcément partisan, et pour sa lutte contre le gaspillage des deniers publics, s’est déclaré satisfait mais avec quelques réserves cependant. “Ces propositions, prises dans leur ensemble, sont une bonne solution pour faire des économies, mais prises une par une, ce n’est pas le cas. La diminution des régions n’entraînera pas à elle seule des économies importantes, un milliard au maximum. L’objectif n’est peut-être pas là. Le Premier ministre, en diminuant le nombre de régions, veut certainement donner aux régions plus de muscle, les renforcer et leur donner plus de pouvoir pour créer de l’emploi.”
Pour le député, une chose est certaine, le nombre de communes est trop important : “C’est surtout le foisonnement de communes, plus de 36.000 en France, et leur superposition avec des structures intercommunales qui nuit à l’efficacité et coûte cher. Aujourd’hui elles représentent 165 milliards d’euros de dépenses et c’est là qu’il y a un gisement de réelles économies. Dans ces 165 milliards ont peut faire 10% d’économies en supprimant les doublons”, explique-t-il. Il s’agirait donc de s’orienter plus sûrement vers des structures intercommunales, là où se situerait alors vrai pouvoir de décision, mais en prenant bien soin de transférer les compétences.
Concernant l’avenir des départements, ” Il y aura des résistances très fortes”, reconnaît bien volontiers le parlementaire, mais “les députés ont su voter le non-cumul des mandats, ils vont bien être capables de surmonter leurs corporatismes”, conclut René Dosière en n’oubliant pas de préciser qu’à terme, le montant de l’économie qui pourrait être réalisé sur le mille-feuille administratif serait de15 à 20 milliards.
Réduire le nombre des régions, la fausse bonne… par Europe1fr
Des réactions épidermiques, mais pas seulement
Le président UMP du Conseil général de Savoie, Hervé Gaymard, a estimé mardi que la suppression des départements annoncée par Manuel Valls était “la négation” d’une “politique de proximité” et une “menace pour l’identité savoyarde”. “C’est la négation de la mise en œuvre d’une politique de proximité menée par des élus que les citoyens connaissent, pour favoriser des régions encore plus grandes, éloignées des réalités, dont les élus sont inconnus des citoyens.
Martin Malvy, président socialiste du conseil régional de Midi-Pyrénées, président de l’Association des Petites villes de France : “Le problème est bien-sûr davantage celui du rôle et des moyens des Régions que celui de leur nombre ou de leur superficie. Aucune frontière administrative ne doit être considérée comme étant gravée dans le marbre. Si la condition de Régions fortes – à l’instar de ce qu’elles sont dans certains pays d’Europe – c’est la réduction de leur nombre, alors l’intérêt du pays ce sera effectivement le redécoupage territorial.”
Patrice Joly, président PS du Conseil Général de la Nièvre : “À présent, c’est l’échelle territoriale la plus pertinente pour accompagner le développement de la France rurale qui est attaquée. A travers sa disparition programmée, ce sont les politiques de proximité qui risquent de se trouver stoppées : infrastructures, économie, social, culture…”
Christophe Perny, président PS du Conseil général du Jura : “Ça y est, Manuel Valls a trouvé la solution pour sauver la France : il faut supprimer les départements ! La belle affaire… L’Etat creuse le déficit depuis des dizaines d’années, l’Etat endette le pays, les ménages français trinquent et la seule solution que notre tout nouveau Premier Ministre nous trouve, c’est la suppression de l’échelon local. C’était donc cela la modernité et l’innovation ?”
Jean-Jack Queyranne, président PS de la Région Rhône-Alpes : “Une vraie étape de la décentralisation est enfin engagée après les mauvais bricolages de ces dernières années. Je souhaite une loi-cadre qui définisse très vite les objectifs de clarification et de responsabilité de chaque collectivité locale. La réduction du nombre des Régions n’a de sens que si elle s’accompagne d’un renforcement de leurs compétences et de leurs moyens. La suppression des Départements s’impose pour des raisons de simplification et d’économie au profit des Régions et des Intercommunalités. Il faut que chacun ait désormais des compétences bien définies.”
De son côté Claudy Lebreton, président de l’Association des départements de France, se dit “abasourdi” par la décision de “supprimer les conseils départementaux à l’horizon 2021” et “dénonce vivement la brutalité de la méthode employée par le Gouvernement”.